« Ma Belle, réveille toi, réveille toi. »
Pas de réaction de la part de l'aimée. Il la caresse, là, parcourt les lignes sur son corps, passe au creux de ses reins, dans son dos, sur son cou, sa joue, son visage entier. Il la sent frissonner sous son toucher, son corps maigre bouge légèrement, les ombres dans le creux de ses os se modifient. Il passe sa main dans ses cheveux sombres, découvre son cou, comme un gamin découvrirait un trésor. Mais ce n'est pas totalement faux. Elle est son trésor, sa vie.
Elle est si Belle.
« Je ne suis plus Belle. », finit-elle par dire finalement, d'une voix étouffée, chuchotée dans un délicieux murmure.
Il soupire légèrement, approche sa tête de son cou, respire son parfum si délicieux. Il la voit bouger, encore, ses ombres bougeant, changeant, se cachant, s'exposant. Mais désormais il en veut plus, dans la délicieuse torpeur qu'elle lui a inspiré. Il s'approche encore, l'embrasse là, au milieu de sa nuque, un baiser doux, léger. Il l'embrasse sur cette ligne épaisse qu'est la cicatrice, comme il veut l'appeler. Mutilation est un mot si laid pour sa Belle. Elle gémit, de sa façon si plaintive, comme un animal blessé devant un prédateur. Il aime ça, la sentir à lui, la sentir l'aimer.
« Loup, arrête. », chuchote- t-elle.
Il la voit se contracter, frémissante, attendant. Il caresse les lignes sur ses reins, dans son dos cambré. Elle est si maigre, elle doit manger. Il lui préparera quelque chose.
Mais elle est si Belle.
Il se recouche à côté d'elle, dans son dos, passant ses mains sur son ventre, posant sa tête dans son dos. Il a un sourire.
« Ce n'est pas la Bête qui viendra réclamer son dû. », dit-il avec un sourire, « il est loin maintenant. »
Il la sent se contracter, dans un spasme hésitant. Il la serre tout contre lui.
« C'est moi la Bête désormais. », dit-elle, dans un sanglot difficilement retenu.
Il lui caresse les cheveux, l'embrasse dans le dos, la serre contre lui.
« C'est faux. Tu es Belle. », la contredit-il.
Il est si sincère. Combien de fois lui a-t-il répété ça? Elle ne l'a jamais cru, mais il ne se lasse pas de lui dire. C'est une douce vérité qu'il lui annonce doucement. Elle finira bien par l'accepter.
Elle est si Belle.
Elle se retourne, se cogne contre son torse nu, y réfugie ses larmes. Il la tient tout contre lui, la console, cette pauvre âme en peine. Ah, qu'est-ce qu'il l'aime ! Il n'aurait jamais cru ça possible.
Il la caresse doucement, dans ce monde qui n'est pas le leur.
« Loup, qu'est-ce qu'on fait ici ? », lui demande-t-elle.
Ah, combien de fois lui a-t-elle posé la question ! Si seulement il avait eu la réponse ! Il sent son odeur de nostalgie des temps passés. Elle regrette. Pas lui.
« Pour que nous puissions nous aimer ma Belle. », lui répond-il, comme toujours.
Elle se serre contre lui, dans une étreinte ayant besoin de réconfort. Elle aime cette explication, le sacrifice de sa beauté n'ayant pas été vain.
Elle est si Belle.
Avant. Avant c'était un autre monde, différent, où ils étaient emprisonnés. On avait décidé de leur destin, même si eux ne voulaient pas. Et ici on a déformé la vérité, faisant croire au bonheur dans d'immondes calomnies. Mensonge ! Il n'a jamais tué personne ! Il ne s'agissait là que d'un complot ! Mensonge ! Elle n'était pas heureuse avec lui ! Il était un Monstre, depuis ce jour maudit où elle a eu l'impotence de demander une rose. C'est son père qu'elle a voulu sauver, c'est elle-même qui s'est détruite. Et fut venu le jour où ils disparurent de ce monde, elle blessée, lui pourchassé, les deux victimes. Il ne la connaissait guère que de loin, son cruel mari étant un lointain cousin.
Ce fut autre part qu'ils revinrent. Dans cet endroit là, loin de ce qu'ils appellent les contes de fée. Ce fut une aventure pour lui, un nouveau cauchemar pour elle. Puis il la découvrit, là, pleurant sous ce coin de pont. Dans un premier temps il l'ignora, lui qui avait réussi dans ce monde-ci. Mais il la revit ; encore ici ; plus loin là bas. Et son cœur grossissait d'une pitié guère innocente, d'une pitié aimante. Il l'aida, l'aima ; il l'aime encore d'ailleurs.
« Loup... ça te manque des fois ? », lui demande-t-elle.
Elle s'est calmée, là, sur son torse. Son cœur s'emballe, il la trouve magnifique. Elle plante ses doigts dans son dos mais il ne se plaint pas, si c'est elle, ça va.
« Pas du tout. Ici je suis avec toi. Tu es ce qu'il me manquait. », assure-t-il.
Il sent son cœur à elle s'emballer maintenant. Elle est touchée. Ses ongles s'enfoncent plus dans sa chair alors qu'elle se rapproche de lui. Lui sait qu'elle ne veut plus penser à là-bas. C'était si horrible, son sacrifice. Elle avait été si horrifiée de découvrir ce que les gens d'ici croyaient. Était-elle heureuse avec la Bête? Oh non, bien sûr que non ! Il ne s'agissait que d'un cauchemar pour elle. Les griffes du monstre la marquant, la déchirant.
Ça le rassure. Elle l'aime. Elle a toujours peur, mais plus comme ça. Ce n'était que la peur des cauchemars, peur du passé, parfois peur de l'avenir. Mais jamais du présent.
Elle lève la tête vers lui. Il pose ses lèvres sur sa joue mouillée de larmes et de cicatrices, ces scarifications cruelles. Il a si peur de la briser.
Il a un léger sourire. Ce n'est plus la Belle, de la Bête et la Belle. Ce n'est plus le Loup, du petit chaperon rouge. C'est Belle et Loup, du monde réel, de ce monde-ci, libres de tout écrivain.
Ça fait longtemps qu'ils sont ici désormais, qu'ils ne sont plus l'œuvre d'un écrivain éméché, la victime d'un narrateur moqueur. Une liberté qui leur a permis de se trouver, une liberté si chère payée.
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Notes :
Et voici une autre partie de la vie des personnages de mon autre fic "c'est un monstre !". C'est plus clair et on découvre que c'est différent de ce qu'on croyait à la base!
Notes d'auteur :
Bonne lecture !
Note de fin de chapitre:
J'espère que vous avez aimé ! (et compris héhé)
Quand j'ai écris la fin je me suis dis "c'est même pas vrai pauvre d'eux bouhouhou! " xD
N'hésitez pas à laisser un commentaire, merci pour votre lecture c:
Quand j'ai écris la fin je me suis dis "c'est même pas vrai pauvre d'eux bouhouhou! " xD
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