Courir.
Je cours.
Chaque foulée tombe.
C'est ça courir.
Une chute sans cesse retardée.
Parce qu'on vole sans ailes.
Parce qu'on tombe à l'horizontale.
Parce qu'on nage dans notre sueur liquide.
Courir ce n'est pas juste avancer tout droit.
Je crois que je vole mais en fait je tombe.
Comme jadis Icare, si je vais trop loin je m'écroulerai.
Pas en mer, pas de haut mais je chuterai sur la terre.
L'effort ayant fait fondre mon énergie comme le soleil la cire blanche.
Mais j'aime tant ça courir, c'est un passe-temps qui me fait traverser.
Des forêts, des heures, des gens, des rêves, des vies, comme tant de lieux inexplorés.
Je souris dans l'effort, dans la souffrance, je souris parce que le mouvement, la vitesse.
Je bouge dans toute ma splendeur ; et si la beauté est relative, j'habite mon corps parfaitement.
En cet instant, je suis moi, mouvement, et pas moi immobile et sédentaire, je suis VIVANTE et pleine.
Plein de vie, de pensées parasites et géniales, et pleine des rêves que je n'ai pas encore faits.
En moi l'orage et le soleil se succèdent, je bout , je m'assèche comme un désert, devient sable, poussière.
Mes pas comme une musique, le tempo de mon cœur désynchronisé de celui de mes pieds, batteries infernale, automatique et irréversible.