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Notes d'auteur :

Hello,

Voici le cinquième texte de ce recueil qui en comptera douze au total.

Au chapitre précédent, Zélie fêtait l'anniversaire de son frère, et embrassait pour la première fois Quentin, le meilleur ami de son frère.

Ici, nous sommes deux ans plus tard, en 2002. Zélie a 16 ans, son frère Isidore, 20 ans.

Et c'est la première fois où elle est confrontée à un échec.

Allongée sur son lit, Zélie est en pleine conversation téléphonique avec Atima qui est retournée pour l'été à Pondichéry voir sa famille. Leur conversation est minutée, rapide et efficace, parce que le mois dernier, elle a eu 400 euros de dépassement de forfait, et ses parents ont un peu fait la gueule. Normal.

« Je te dis que c'est bizarre, avec Quentin. Je pensais qu'il reviendrait à Bourges pour les vacances, il aurait pu trouver un petit boulot ici, mais il préfère rester à Bordeaux. »
Atima prend un court temps de silence, minuté aussi.
« Il y a un écart d'âge, il a peut-être envie d'autre chose ? Tu n'as que seize ans, Zélie. »
Zélie s'agace mais rapidement, parce qu'elle n'a pas le temps. Et elle sait que derrière elle pourra appeler Manu qui est bien plus grande gueule qu'Atima.
« Je sais l'âge que j'ai, mais je lui ai dit que je l'attendrai. Je suis pas encore prête à... enfin, tu vois quoi.
- Tu ne veux pas aller le voir ?
- Je ne peux pas dormir au FJT, et Isi a rendu son appartement. Il est rentré il y a deux jours.
- Ben tu peux pas en parler à Isi ? C'est son pote après tout. »
Zélie se tait. Trop longtemps, alors Atima met fin à la conversation, en lui promettant de la rappeler la semaine prochaine. Zélie repose son téléphone, soupire un coup, et s'assoie dans son lit, tout en appuyant de nouveau sur le bouton, jusqu'à entendre la petite sonnerie. Elle approche son téléphone de sa bouche.
« Appeler Manu sur son portable. »
La synthèse vocale lui répond que l'appel est en cours. Et c'est avec une voix pâteuse que Manu répond, Zélie l'a visiblement réveillée.
« Putain, mais il est 10h, Zélie, tu fais chier ! »
« Oui, bonjour à toi aussi... »
Manu fait silence, et Zélie se l'imagine en train de passer sa main sur son visage pour en ôter toute trace de fatigue.
« Comment ça va, Zélie ? Je vais me faire un café... »
Les deux filles discutent tranquillement, le temps que Manu émerge. Zélie sait qu'elle n'est pas du matin, ou pas du réveil, toujours, et Manu n'est pas fonctionnelle avant d'avoir ingurgité un solide petit déjeuner. Au bout d'un petit quart d'heure, Manu pousse un soupir, et Zélie sait qu'elle est maintenant capable de l'écouter.
« Quentin ne rentre pas cet été. Il reste à Bordeaux. Je ne sais pas quand on va pouvoir se voir. Il est plus distant... »
La voix de Zélie se brise, juste un peu, et un profond silence se fait entendre à l'autre bout du fil.
« J'arrive, Zélie. Tu me laisses une grosse demi-heure ? »
Zélie acquiesce, puis répond oui, avant de raccrocher. Atima est la meilleure pour écouter, mais Manu est la meilleure pour dire les choses. Ses deux amies se complètent à un point qu'elles ignorent.

 

Quand Manu arrive chez Zélie, déjà un peu plus réveillée, elle a à peine passée le portail qu'Isidore sort de la maison alors que sa mère essaie de le retenir, les clés de voiture dans les mains, et le téléphone dans l'autre, dans lequel il hurle, les phalanges blanchies par l'effort.

« Je vais te casser la gueule, je te dis. »

Zélie est debout derrière sa mère, en train d'essuyer ses larmes.

« Isidore, je t'interdis d'aller à Bordeaux ! »

Zélie s'avance, sa mère lui faisant de la place, et ses mains tâtonnent à la recherche de celles de Manu.

« Emmène-moi jusqu'à la voiture... Je ne veux pas qu'il y aille... »

Manu l'accompagne jusqu'à la voiture, qu'Isidore n'a pas encore réussi à ouvrir, tellement il est furieux.

« Isi, laisse tomber... C'est pas grave. »

Arrivée à la voiture, Zélie lâche le bras de Manu et longe la voiture en l'effleurant de sa main, jusqu'à arriver à son frère. Ses mains prennent les clés de voiture, et elle ferme ses bras autour de son frère qui tremble encore de fureur contenue. Il raccroche le téléphone avant de l'enfourner dans sa poche, et de refermer ses bras sur sa sœur, et de la serrer très fort contre lui.

Toute la petite famille, et Manu, retournent à la maison. Lucie, la mère d'Isidore et Zélie, réchauffe la cafetière et tout le monde s'installe autour de la table. Zélie garde la main sur le bras d'Isidore.

« Tu me réconfortes alors que c'est toi qui en as besoin. »

Manu se tait et remercie Lucie d'un sourire pour la tasse. Le sucre rejoint rapidement la table, ainsi que des biscuits que Lucie a fait ce matin.

« On a tous les deux perdus quelqu'un, Isi. »

C'est juste un filet de voix qui s'échappe des lèvres de Zélie, mais elle a une tête brave.

« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » s'avance Manu.

Un muscle tressaute à la mâchoire d'Isidore, qui répond en serrant les dents.

« Quentin lui a laissé un message sur le répondeur et l'a larguée. Comme ça. »

Il plonge alors son regard dans celui de Manu, la colère affleurant à la surface.

« Et il lui a dit qu'il ne pouvait pas s'occuper d'elle, qu'il ne se sentait pas d'être avec elle parce qu'elle est aveugle. »

Manu serre les dents aussi, et regarde alors Zélie. Elle avance sa main sur la table jusqu'à effleurer ses doigts qu'elle enserre.

« C'est un connard, Zélie. »

La jeune fille secoue la tête, avec un sourire résigné.

« Non, il a juste fait un choix, et ce n'est pas moi. »

Les regards se tournent vers elle, empreints de fierté pour certains et de compréhension pour d'autres. Manu garde en main la main de Zélie qu'elle serre une dernière fois.

« Tu veux me faire écouter tes nouveaux morceaux ? »

Zélie sourit et s'anime. Sa chambre, au fil des années, est devenue en partie un studio de musique. Elle a un clavier depuis le collège, une guitare et une harpe celtique. Ce que Manu appelle le super-pouvoir de Zélie, est cette capacité qu'elle a de jouer une musique à l'oreille. Elle prend des cours à l'école de musique aussi. Et Zélie est vraiment douée. Depuis, la maison familiale résonne régulièrement de musique qu'elle écoute, qu'elle interprète, qu'elle invente. Et lors d'un voyage à Rennes pour rendre visite à une tante, toute la famille s'est rendue au festival Mythos, un festival de musique et de contes. Et depuis, Zélie ne jure que par cela. La musique et les contes. Ses parents ne sont pas très à l'aise avec le fait qu'elle veuille en faire son métier, mais ils n'en disent rien, ou le disent de manière pas suffisamment claire pour que Zélie entende leur peur de la voir partir sur les routes si elle choisit vraiment cette voie.

Alors, Zélie berce ces rêves de spectacle où elle serait conteuse et musicienne, et émerveillerait son public. Elle sent la main de Manu qui se pose sur son épaule.

« Allez, fais-moi rêver, Zélie zolie. »

Zélie éclate de rire en entendant ce surnom qu'elle aime mais qui est tellement ridicule. Elle se lève et attrape le bras de Manu qui la mène jusqu'à sa chambre à l'étage. Zélie n'a pas besoin d'être accompagnée, chez elle, elle connaît par cœur les lieux, mais elle apprécie Manu et Atima qui sont à ses petits soins, même si elle essaie d'être aussi autonome que possible.

Zélie se tient au milieu de ses instruments, hésitante.

« Tu veux que je te raconte quoi ? »

Manu s'assoie sur son lit et fait mine de réfléchir.

« Mange-cailloux. »

Zélie sourit, redresse ses lunettes roses sur son nez, et s'installe à tâtons, délicate et mesurée, sur le tabouret de pianiste. Elle attrape sa harpe celtique qu'elle cale entre ses genoux, et vient la reposer sur son épaule en une étreinte familière.

« Il y a fort, fort longtemps, vivait dans un royaume une princesse si malheureuse que ses larmes avaient inondé toutes les terres alentours... »

Et Zélie raconte son histoire, de sa voix douce et mesurée, alors que ses doigts pincent les cordes de la harpe à toute vitesse. Et cette rêverie dans laquelle elle se glisse éloigne la déception de Quentin et ses mots qu'il a sans doute soupesés avant de les dire.

Zélie ne veut être un poids pour personne.

Note de fin de chapitre:

Encore ici ? Cool !

Je viens juste de finir d'écrire ce texte, et j'aurai voulu finir la boîte à flemme 2 avant que la 3 ne sorte, mais tant pis (et je n'ai pas de textes d'avance sur Zélie, juste un bon petit plan et quelques idées).

J'espère mettre un bon coup de collier pour le terminer rapidement :)

J'espère aussi que la lecture vous a été agréable, à bientôt !

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