Augustine poussa Corinne derrière un buisson et s’y accroupit aussi dans l’espoir que la petite fille puisse reprendre son souffle avant qu’elles étaient découvertes. Elle ne comprenait pas pourquoi la gamine s’entêtait à vouloir la suivre, faire équipe avec elle ou même lui parler. Enfin bon, elle n’avait rien contre, elle était gentille Corinne, mais c’était étonnant.
Un mouvement sur sa droite attira son attention. Non, c’était un dossard rouge, elles n’avaient rien à craindre de lui. Par contre, elles pourraient l’attraper… Elle jeta un coup d’œil à Corinne qui lui rendit son regard, déterminée malgré sa main appuyée contre son point de côté. Elle l’avait un peu trop malmenée à coup de sprints entre les cachettes. Le regard d’Augustine glissa vers la poule – hum vers Sylvie – qui se croyait discrète pour les prendre à revers. Un nouveau sprint pourrait bien mal se terminer pour sa petite coéquipière et la voir partir dans la prison des poules nécessiterait d’aller la délivrer et donc d’attirer l’attention. Elle leva le regard, la branche de l’arbre était suffisamment basse pour y accéder mais il y avait certainement une règle disant qu’il ne fallait pas quitter le sol durant une partie de poules-renards-vipères.
Elle désigna le garçon de l’équipe des renards à Corinne en espérant qu’elle comprenne ce qu’elle attendait d’elle et n’attendit pas plus longtemps pour se précipiter à la rencontre de Sylvie. Comme elle l’avait espéré, l’effet de surprise jouait en sa faveur et l’adolescente en face marqua un temps d’arrêt avant de se mettre à sa poursuite, laissant à Corinne tout le temps nécessaire de courir vers Jean-Pierre et clamer une alliance temporaire. Il ne lui restait plus qu’à mener Sylvie vers le garçon et…
– Touché ! s’écria Jean-Pierre.
– Fin de l’alliance, s’exclama Corinne une seconde avant que la main d’Augustine ne touche le dossard du garçon.
– C’est de la triche, ronchonna-t-il. On avait fait une trêve…
Les deux vipères échangèrent un regard victorieux en raccompagnant les deux prisonniers au centre du terrain de jeu. En passant Corinne tapa nonchalamment dans la main tendue de Louise, prisonnière, et elles pressèrent le pas pour échapper aux poules en quête de vengeance.
– C’est fini, les enfants ! déclara Grégoire après avoir sifflé pour attirer l’attention. Je peux déjà vous dire que les vipères ont gagné !
Vu les regards noirs qu’elle récoltait, les autres équipes savaient qui leur avait causé cette défaite. Elle avait encore attiré l’attention sans le vouloir. Monique n’allait pas se priver de les moquer lors du repas pour se venger. Elle s’était vantée de maîtriser le jeu à la perfection et de ne pas pouvoir perdre. Elle menait l’équipe des renards…
Enfin, pour le moment, les deux filles furent chargées de ramener les plots et les dossards utilisés dans la cabane de jardinier. Au regard espiègle que Corinne lui lançait, elle devait également avoir remarqué cette échéance bienvenue. Et elles allaient prendre tout leur temps. D’autant plus que Grégoire ne leur avait seulement vaguement indiqué la direction.
– Tu sais où on va en fait ? s’enquit Corinne en sautillant à côté d’elle.
Augustine haussa les épaules. Il y avait plusieurs abris derrière le vieil bâtiment. L’un d’entre eux serait le bon. Elles se retrouvèrent donc devant, les bras chargés.
– Celle-ci ! tenta de deviner Corinne en en désignant une au hasard.
L’aînée esquissa un sourire en tirant sur le verrou. Elle ne croyait pas en ce genre de coup de chance. D’habitude c’était plutôt la loi de Murphy qui décidait que c’était le dernier de tous les essais qui était le bon. Mais bon, elle n’allait pas gâcher l’enthousiasme d’une gamine encore naïve.
Ses yeux mirent un instant à s’adapter à l’obscurité de la remise puis son sourire s’élargit. Elles s’étaient vraiment bien trompées. Les skis et les luges n’étaient vraiment pas utiles en cette saison. Pourquoi n’avait-elle pas été fermée à clé par contre ? Enfin, si ça se trouvait aucune ne l’était jamais. N’empêche que chez elle son père fermait leur minuscule cabane de jardin, où même la tondeuse ne rentrait qu’à grande peine, à clé à chaque fois. Et elle avait tendance à croire que si les choses n’étaient pas fermées correctement, il y avait une bonne raison à cela.
– Oh, dommage, regretta bruyamment Corinne puis s’éloigna en sautillant. Je vais tenter celle-là alors !
Vraiment elle n’y comprenait rien aux comportements de la petite fille. Autant les autres autour d’elles, elle voyait un peu ce qui les motivait et pourquoi ils réagissaient comme ils le faisaient. Mais Corinne… non, elle ne comprenait pas comme elle passait des larmes au rire et l’inverse en moins de deux secondes. Pourquoi elle tenait tant à être son amie alors qu’elle peinait à lire ses réponses quand elle essayait ? Non, c’était incompréhensible. Personne ne voulait être avec elle normalement. En même temps, personne ne voulait être contre elle aussi visiblement que Monique et sa bande non plus normalement. Rien n’était normal en colonie de vacances, fallait faire avec.
Les affaires rangées, les deux filles se rendirent dans le réfectoire, une grande pièce au rez-de-chaussée, adjacent aux cuisines, pour déjeuner. Comme toujours, il y avait un plat simple et facilement faisable en grande quantité : des pâtes au beurre. Si Augustine n’avait pas été habituée aux compétences de cuisiniers inexistantes chez elle, elle n’aurait pas pu en avaler trois fois par semaines. Corinne s’en plaignait suffisamment pour qu’elle avait compris que ce n’était pas ordinaire. Enfin, tout le monde se plaignait toujours des repas servis. A part quand ils pouvaient partager des ragots.
– Et puis là, tu ne t’imagines jamais qui j’ai vu avec Mireille…
– Qui ? Dis-le-moi, enfin ! Ce n’était pas Jérôme ?
– Tu parles, la seule à ne rien voir entre eux c’est Monique !
– Elle sera furieuse quand elle l’apprendra. Mais ne me fait pas mijoter plus longtemps, qui est-ce que tu as vu avec Mireille ?
– C’était Serge !
– Eh ben. J’ai du mal à y croire. Je le croyais toujours sous le charme de Fabienne ?
– Ah ça, je n’en sais rien…
Augustine tira rapidement Corinne plus loin des vipères de commérages nommées Sylvie et Martine. Aucune envie qu’elles ne les voient et changent de sujet… Et de toute façon, elles ne comprenaient jamais rien de ce qu’elles entendaient dire. Evidemment que Serge faisait semblant de s’intéresser à Mireille qui n’avait de yeux que pour Jérôme pour éviter les soupçons de Hugo, le grand frère protecteur de Fabienne, qui l’avait juste déjà menacé plusieurs fois de lui casser le nez. Et Mireille y trouvait son compte pour ne pas attirer les foudres de Monique, chose que personne ne voulait, à cause de Jérôme. Par contre, il était tout aussi évident que Monique n’avait rien à faire de Jérôme et que si elle entretenait une liaison avec lui, c’était pour couvrir le jeune homme qui venait parfois du village pour la retrouver. Rien de bien compliqué et certainement rien d’intéressant de toute manière. Qu’ils fassent tous ce qu’ils voulaient.
– Regarde qui vient de passer, fit mine de s’étonner Sylvie en balançant un coup de coude à son amie. Mais c’est les deux ratées !
– Les deux exclus, la muette et son acolyte idiote !
Augustine leva les yeux au ciel et entraîna Corinne plus loin. Cela ne servait à rien d’y répondre et encore moins d’y prêter la moindre attention. Si elles n’avaient rien de mieux à faire, c’était leur problème pas le sien.
– Un jour, vous regretterez ! cria la petite fille en se débattant un peu. Vous verrez bien !
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Notes d'auteur :
Coucou ! Voici enfin la suite !
Et pour le prix d'un, je vous mets la suite directement ;)
Et pour le prix d'un, je vous mets la suite directement ;)
Note de fin de chapitre:
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