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Notes d'auteur :

Hello,

Je vous invite à lire (après ce quatrième chapitre), la note de fin

Tirage des runes ou la ruine : le passé. Othila. Séparation, retrait, héritage. Votre personnage a vécu dans le passé une séparation radicale ou un abandon.

Une autre inspiration a été un atelier de Lyssa sur Discord, sur la symbolique des objets. Elle m'avait attribué la hache (masse d'arme) symbolisant le pouvoir, l'héroïsme et la force, la croix (rite de l'Ancien) symbolisant la foi, la protection et les épreuves et enfin le livre symbolisant le savoir, la connaissance et l'intelligence. Cela apparaît assez peu dans le texte ici, mais je vais sûrement continuer à faire mûrir cela dans mon esprit.

Je vous souhaite une bonne lecture !

Jamais ils n'ont écrit, les hommes gris. Parce que l'homme gris qui n'est plus seul maintenant, ne l'était pas, avant. Ils étaient une multitude. Certains, comme lui, avaient un nom, mais la plupart n'en avait pas. Ils n'avaient pas cette manie des hommes de nommer les choses et les gens. Ils n'avaient pas cette manie des hommes d'écrire leur histoire, leurs exploits, leurs rites. Tout se transmettait oralement dans cette langue qui sonne encore à ses oreilles mais qu'il est incapable de parler, désormais qu'il est seul sans ne plus l'être. Mais les hommes se sont levés, alors qu'ils n'étaient que de simples mortels, si fragiles qu'ils s'éteignaient dans un souffle. Et ils ont commencé à écrire, à grandir, prospérer, empiéter sur des terres éternelles à qui appartenaient des peuples tout aussi éternels.

Les hommes gris sont retournés sous terre. Et avec eux, tant et tant d'autres peuples. Les terres se sont effacées, et les vivants aussi, et la magie s'est enfouie, enfuie. Seuls demeuraient certains êtres dont votre Serviteur...

 

Zack a dans ses mains fermées un squelette d'oiseau qui palpite d'une vie qui ne devrait pas être. L'homme gris a récupéré ses mains et regarde le petit d'homme d'un air presque méfiant. Il a toujours dans le nez cette odeur ancienne, puissante, ô, tellement plus puissante que celle de ses semblables. Zack lève alors les yeux vers l'homme gris, et son visage s'allonge.

Les corbeaux qui jacassaient dans l'arbre s'envolent tous en une nuée criarde, et d'arbre en arbre, bientôt, le ciel est empli d'oiseaux qui crient, chantent, battant des ailes affolées. Une dame qui promène son chien leur lance un regard inquiet avant de rappeler son teckel qui divague, se plante à bonne distance d'eux, et aboie à s'en casser les cordes vocales. Les yeux clairs de Zack reviennent sur l'homme gris, puis sur la dame qui s'enfuit en courant.

« Elle te voit... Elle te voit. Faut qu'on rentre à la maison. Maintenant... »

Zack rassemble ses jambes sous ses fesses et se relève, l'homme gris étant déjà debout. Le petit garçon ouvre un peu ses mains et grimace de dégoût quand ce qui était un squelette s'habille maintenant de chair, alors il les referme et garde cette vie palpitante entre ses doigts. Zack se met à courir et entend derrière lui les pesants pas de l'homme gris. Et en regardant les passants qui s'écartent de leur chemin, l'enfant a de plus en plus l'impression qu'ils voient l'homme gris tel qu'il est, et ça, c'est pas normal du tout.

La brise lui apporte le son d'un ricanement, et Zack comme l'homme gris, tournent la tête de tous côtés pour en chercher la provenance.

« Evite les ombres, Zack ! »

Zack, rapide comme un lévrier, slalome entre les ombres immenses des arbres du parc. Cela n'a aucun sens non plus, mais si l'homme gris le dit, c'est que cela doit être important.

Ils arrivent enfin au bas de l'immeuble, et là encore, tout le monde s'efface pour les laisser passer. Certains garçons fuient comme s'ils avaient vu le diable... Mais Zack s'arrête à l'entrée de l'immeuble parce que le hall est plongé dans la pénombre, il n'y a aucune lumière, pas même celle des issues de secours. Les mains toujours encombrées par l'oiseau, Zack fait un signe de tête à l'homme gris qui ouvre la porte avec un peu trop d'entrain et l'arrache de ses gonds, avant de la jeter sur le côté. Zack entrouvre de nouveau ses mains, et le squelette, maintenant habillé de chair, se vêt de plumes aussi. Il entre dans le hall de son immeuble, avec une sensation de familiarité et d'étrangeté à la fois, quelque chose qui le met mal à l'aise, et le force à se tourner vers l'homme gris, qui n'a toujours pas de nom mais a les yeux voilés de souvenirs qui remontent à la surface. Il tient dans ses poings fermés sa masse d'arme, avec l'air de celui qui a l'intention de s'en servir.

Zack regarde les ombres d'un air inquiet, et se met à courir dans le hall puis monter les escaliers à toute vitesse. Il émet un sifflement quand il entend l'homme gris se cogner aux marches de l'escalier de l'étage au-dessus, comme il le fait à chaque fois qu'il les monte ou les descend. Il se cognera aussi en entrant chez Zack, comme à chaque fois. Les quatre étages sont vites gravis, et ils ne croisent personne. Zack ne veut pas que l'homme gris arrache la porte de son appartement, alors, il appuie sur la poignée et pousse la porte de son épaule, appelant.

« Maman ! Maman ! Il s'est passé... »

Mais Zack s'arrête parce que si le hall était plongé dans la pénombre, il ne voit pas à dix centimètres dans leur appartement. Une vague d'inquiétude le submerge, et Zack prend une grande inspiration, mais la large main de l'homme gris vient se poser sur ses lèvres, et il entend sa voix profonde murmurer à son oreille.

« Je passe devant. Rends-lui l'oiseau. C'est de lui que cela vient. »

Les mains de Zack s'ouvrent, et ce qui y palpitait et était tout doux s'en envole. Comme ils pénètrent dans l'obscurité, Zack se rend compte du silence qui y règne. De peur, il attrape la chemise de l'homme gris et ferme ses mains dessus.

« Maman doit être dans le salon. »

Zack essaie de suivre les grandes enjambées de l'homme gris et crève de trouille. Les battements d'ailes du petit oiseau font un boucan d'enfer, et l'écho renvoyé par les murs ou les meubles lui donne l'impression que l'appartement est bien plus grand.

L'homme gris hume l'obscurité, cette odeur ancienne est absolument partout. Celle de Zack, et celle de l'Autre. Il n'arrive pas à s'orienter, et se dirige en tâtonnant. Ses muscles retrouvent des réflexes d'antan, la masse d'arme solidement tenue par ses poings immenses.

« Hé, t'entends, l'homme gris ? »

L'homme gris tend l'oreille, et l'écho d'un ricanement se fait entendre, se répercutant dans l'obscurité, ricochant d'ombre en ombre. Il y a un murmure, aussi, qui semble venir de partout et de nulle part à la fois. Et l'homme gris est envahi de souvenirs qui se mêlent à ce qu'il ne voit pas, mais suppose. L'Autre. Ils en parlaient, et le redoutaient avec les siens, autrefois, dans ce temps qui lui échappe encore.

Une faible lueur, ou une obscurité plus claire, se fait entrevoir dans le fond du couloir, mais vu depuis le temps qu'ils marchent ici, l'homme gris se doute bien qu'ils ne sont plus dans l'appartement de Zack et sa mère. Les mains du petit garçon sont toujours fermement accrochées à sa chemise, mais soudain elles se décrochent, et avant qu'il n'ait pu le retenir, Zack file, suivant les battements d'ailes de l'oiseau, et une voix qui conte, là-bas, où l'obscurité est moins obscure.

« Maman !!! »

Zack crie et se met à courir, les mains en avant, l'homme gris sur ses pas.

Alors, c'est ainsi, ma belle ? Je ne t'ai pas couronnée du tout, tu l'as fait toute seule.

La voix semble venir de partout autour d'eux, et Zack entend la respiration affolée de sa mère, ce qui le force à courir encore plus, et même l'homme gris a du mal à tenir son rythme. Mais ce qui inquiète l'homme gris, c'est qu'il n'a aucune idée de l'endroit où ils sont. Il n'a jamais vécu cela, mais a entendu parler des tours de magie de l'Autre, qui font perdre la tête à ceux qui s'y égarent. Il pense même que l'Autre peut les retenir aisément dans son obscurité, les garder pour lui, à tout jamais, et ça non.

Bats des ailes, bats des ailes, prends ton envol, ma reine.

« Zack ? »

Et notre fils arrive avec son chien de guerre... Comment s'appelle l'homme gris, qui se perd dans ses souvenirs ?

« Maman ?! »

L'homme gris ne voit pas plus loin que le bout de son nez, et déjà, il ne sait plus du tout où a filé Zack. L'odeur ancienne est partout, envahit ses sens, le perd plus encore que ne le perd l'obscurité, et tout autour de lui, il entend les pas de Zack qui courent, les battements des ailes de l'oiseau, les appels de Zack et de sa mère, et le ricanement. Ce ricanement qu'il a déjà entendu. Ce ricanement qui est indissociable de l'Autre.

A grands moulinets de bras et avec plein de grognements, l'homme gris abat sa masse d'arme autour de lui, de gauche à droite, de droite à gauche, de haut en bas, de bas en haut, il tourne sur lui même comme une toupie folle, mais sa masse ne rencontre que du vide et de l'obscur. Rien de tangible, et le ricanement continue, et les appels de Tennessee et son fils, et les battements des ailes de l'oiseau, et les pas de Zack. L'odeur ancienne est partout, partout, partout. Et l'homme gris n'est nulle part.

Soudain, il a du mal à respirer. Ce n'est plus d'obscurité qu'il est entouré, mais dans l'obscurité qu'il est enterré. La terre s'infiltre dans ses narines, ses yeux, sa gorge. Il ne peut plus respirer. Il étouffe. Il était au cœur d'une bataille, il y avait beaucoup de morts parmi ses semblables et parmi les humains, puis les Orcs ont commencé à tomber, un à un, sans même recevoir un coup d'épée ou de lance. Comme ça, en un claquement de doigts, c'était inexplicable. Bientôt, l'homme gris est resté le dernier debout. Bientôt, l'homme gris est le dernier à tomber. Et c'est sur un homme gris parfaitement réveillé que la terre s'est refermée.

Il sort de sa transe en s'ébrouant et se retrouve dans cette obscurité. Il cligne des yeux sur rien. Son humeur belliqueuse affleure à la surface de sa conscience, et sa main se referme de nouveau sur la garde de sa masse d'arme. Il se relève, et avise cette partie encore plus obscure, et d'un bras vigoureux assène un coup dans cette direction, sûr de toucher quelque chose, sûr d'abattre l'Autre et de faire cesser ses illusions. Mais quelque chose comme une main immense lui enserre le bras, et ça lui fait tellement mal qu'il a l'impression qu'il est en train de le broyer. Cela serre, serre, serre si fort que ses jambes cèdent, et que toute l'obscurité semble se concentrer en une silhouette immense. L'homme gris lève ses yeux plus noirs que la plus noire des nuits vers ce qui est encore plus obscur et sombre, qu'aucun mot ne parvient à le définir. Puis de la couleur cuivre vient marbrer cette sombreté, et toute l'obscurité se réfugie dans un regard qui transperce, et le visage se fend d'un sourire grimaçant.

Inutile de combattre, reprends ta place.

« Viens, l'homme gris. On est dans la cuisine. »

La prise sur son bras se défait, et l'Autre glisse sur le sol jusqu'à se cacher dans l'ombre d'un meuble. L'homme gris se relève, desserre les mâchoires qu'il ne savait pas si durement verrouillées, et goûte le sang de sa lèvre dans sa bouche.

Son regard reste sur l'ombre souriante qui se glisse le long du mur, et lui montre le chemin jusqu'à la cuisine, comme s'il l'ignorait. D'un pas pesant il suit le couloir et entre dans la cuisine qui est tellement illuminée que cela lui fait monter les larmes aux yeux. Aveuglé d'obscurité puis aveuglé d'éblouissement, il sent la petite main de Zack se glisser dans la sienne et le guider.

« Baisse la tête ! »

Mais son front vient cogner le chambranle de la porte. L'oiseau se met à voleter autour de sa tête et un rire rocailleux s'échappe de sa bouche, au souvenir de ses dessins animés où des héros s'assomment et voient des oiseaux voler autour de leur tête.

Tennessee, la mère du petit d'homme est là, sa peau brille d'une lumière étrange, ainsi que ses yeux et ses cheveux, et dans son dos, se sont déployées des ailes transparentes qui reflètent la lumière qui émane d'elle. L'homme gris tombe à genoux, comme il était tombé à genoux sous l'emprise de l'Autre. Mais la main de Zack serre la sienne avec une force surprenante. Alors, l'homme gris se tourne vers le petit d'homme qui le regarde, un air immensément fier peint sur le visage. Vient avec cela la certitude que l'homme gris a trouvé en Zack la voix qui le guidera. Même si c'est l'Autre qui murmure à l'oreille de l'enfant. Même si la mère de Zack n'est pas si humaine que cela.

Note de fin de chapitre:

Me voilà presque décoincée dans l'écriture de L'Homme Gris ! En me promenant sur le topic Take a Picture, j'ai réservé (pour plus tard, mais ici il m'a inspirée), Elle avait des ailes, de Ielenna, et j'ai eu un déclic dans mon petit cerveau parce que j'ai pensé à Tennessee. Initialement, c'est étrange, mais pour moi, Tennessee et Zack étaient humains. Mais Zack a quand même la capacité de voir L'homme gris tel qu'il est, et l'autre déclic a été que Tennessee avait des ailes, qu'elle était magique aussi, ce qui explique l'obsession du Décepteur (ici présent) pour elle (dans le Décepteur et dans La Femme Creuse).

Et franchement, cela m'amuse quand des perso vivent par eux-mêmes et décident de ce qu'ils sont, de ce qu'ils font. Je devrai plus les écouter.

Plus que deux chapitres à écrire ici - mais je pense être décoincée, cela va venir... C'est le fait de travailler aussi sur le personnage du Décepteur dans le recueil qui lui est consacré et dans lequel je suis super à la bourre.

Pour Take a picture, Elle avait des ailes : elle fera l'objet d'une nouvelle sur Tennessee, et ses propres origines, parce que je tiens un truc, là, que j'ai envie de développer sur elle. Et c'est assez drôle parce que Tennessee, hormis être la mère un peu transparente de Zack, j'avais un peu de mal à la voir, et elle prend de plus en plus d'épaisseur dans mon esprit.

Ah ! Et enfin, par rapport au personnage du Décepteur (et deux autres aussi, appartenant à l'univers du MCU - Deadpool et Cindy Moon-), je vais essayer de travailler une narration différente avec des personnages qui sont au courant qu'ils font partie d'une histoire, l'influencent, communiquent avec le lecteur, l'auteur. Je vais donc travailler à briser le quatrième mur.

Je vais essayer de finir L'Homme Gris et Le Décepteur rapidement, on verra :)

J'espère que la lecture vous sera agréable, à bientôt !

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