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Les jours qui suivirent furent compliqués pour Vanessa. Chaque matin, elle recevait un texto de Thomas lui demandant quand elle serait disponible pour qu’ils se voient et elle répondait toujours qu’elle n’avait pas le temps, qu’elle avait un travail, qu’elle ne pouvait pas le voir. Mais il était tenace et il continuait à lui envoyer des messages. Pour elle, cela ressemblait très fortement à du harcèlement et elle en avait plus qu’assez.

De ce fait, elle n’avait pas souhaité le rencontrer pour un dîner afin de lui remettre l’article qu’elle avait terminé de rédiger. Elle le lui envoya juste par mail le jeudi de cette même semaine et attendit sa réponse, qui, à sa grande surprise, n’arriva pas le lendemain. D’ailleurs, elle ne reçut aucun message de sa part de la journée. Avait-il compris qu’il fallait qu’il cesse de la harceler comme il le faisait ? Pourtant, tout au fond d’elle-même, elle était un peu déçue. Mais bien sûr, elle chassa rapidement cette pensée.

Ce n’était pas la seule personne qui la harcelait depuis le début de la semaine. Howard s’y était mis également. Ce dernier avait contacté Emma et sa soeur jumelle lui avait raconté la soirée du bal. Depuis, il ne lâchait plus Vanessa : il lui avait demandé comment s’était passé son interview. Vu qu’elle n’avait pas très envie de discuter de ces quelques heures passées avec l’héritier des Johnson, elle avait été très évasive mais Howard avait insisté. Et elle s’était encore plus refermée sur elle-même. Pourquoi sa vie l’intéressait-il autant désormais ? Et maintenant, il lui proposait de venir déjeuner avec lui quasiment tous les midis ce qu’il n’avait jamais fait auparavant. Son attitude était incompréhensible. Quand Vanessa en avait parlé à Emma alors qu’elle était venue la voir un midi dans sa boutique, cette dernière avait éclaté de rire.

“Tu es vraiment aveugle, Vanessa !” avait-elle juste répondu.

Elle n’en avait pas dit plus et Vanessa était restée seule avec ses questions.

Vanessa n’avait pas non plus entendu parler de Annabelle Merrytown. Celle-ci l’avait menacée mais pour l’instant, elle semblait n’avoir rien tenté. Vanessa était plutôt soulagée mais elle savait que cette femme ne lançait pas de menaces comme ça à la légère. Elle allait très certainement entendre parler d’elle prochainement.

Ce vendredi soir, elle avait prévu de ne pas sortir car elle comptait passer la soirée à cuisiner des muffins et des biscuits, qu’elle distribuerait le lendemain à des enfants dans des hôpitaux. Chaque année, à la période de Noël, elle prévoyait toujours du temps pour participer à des actions sociales. Quand elle était enfant, ses parents l’emmenaient toujours quand ils aidaient pour la soupe populaire ou la bourse aux vêtements. Peu à peu, elle avait compris le sens et le bien-fondé de ces actions. C’était aussi ça, l’esprit de Noël : donner un peu de son temps sans attendre quelque chose en retour. Les gens n’avaient généralement pas besoin de beaucoup pour rendre leur quotidien moins pénible : un sourire, une main tendue, une oreille ou un bon repas chaud suffisait parfois. L’année précédente, elle avait distribué la soupe populaire tous les soirs pendant tout le mois de décembre. L’année d’avant, elle avait donné des cours de soutien gratuits à des enfants issus de milieu défavorisé qui avaient besoin d’aide scolaire. L’année encore d’avant, elle avait participé à une collecte de nourriture dans tous les supermarchés de la ville.

Habillée de son tablier blanc, elle commença à sortir tous les ingrédients pour cuisiner ses muffins. Pour se mettre dans l’ambiance, elle avait mis comme musique de fond des chants de Noël et elle chantait à tue-tête “Let it snow!” quand on sonna à sa porte. Vanessa regarda l’heure. Il était 19h, elle n’avait invité personne. Qui pouvait bien venir la déranger ?

Elle alla ouvrir mais resta bouche bée pendant quelques instants avant de pouvoir parler. Thomas Johnson se tenait devant sa porte et lui souriait à pleines dents. Il tenait une grande enveloppe en kraft à la main. Vanessa se reprit finalement de sa surprise.

“Monsieur Johnson ! Mais que faites-vous là ? Et comment savez-vous où j’habite ?” demanda-t-elle rapidement.
“Bonsoir mademoiselle Bale, je suis désolé de vous déranger à cette heure-ci.” dit-il.

Mais Vanessa voyait bien qu’il n’était pas du tout désolé de la déranger.

“J’ai préféré venir vous voir directement pour vous remettre mes commentaires sur votre article.” continua-t-il. Il lui montra l’enveloppe qu’il avait entre les mains en la secouant légèrement. “Puis-je entrer ?”
“Euh… maintenant ? Vous auriez pu m’envoyer cela par mail ! Vous n’aviez pas besoin de vous déplacer pour cela !”
“Mais non ! Je préférais vous voir directement pour discuter du contenu de l’article.”
“Hum… c’est que… maintenant… ce n’est pas forcément le bon moment…” répliqua Vanessa, embarrassée.
“Ah, vous n’êtes pas seule, c’est ça ? Je vous dérange ?” Thomas tenta de regarder derrière son épaule.
“Non, je suis seule… mais je dois…”

Vanessa inspira profondément. Elle n’avait pas très envie de discuter avec lui mais il ne partirait pas sans une bonne excuse de sa part. Elle ne connaissait pas beaucoup Thomas Johnson mais elle avait déjà compris que c’était une personne très têtue.

“Je dois absolument cuisiner des pâtisseries ce soir, je ne peux pas reporter ! Donc, je n’aurai pas de temps à vous consacrer pour l’article…” s’expliqua-t-elle, en prenant un air faussement désolé.
“Voulez-vous un peu d’aide ?” demanda-t-il brusquement. “Je ne sais pas cuisiner mais je suis sûr que je peux vous aider à quelque chose !”
“Oh, non, ce ne sera pas…”
“Si, si, j’insiste ! Avec mon aide, vous terminerez plus rapidement vos gâteaux et nous pourrons jeter un coup d’oeil sur l’article !”

Thomas la regardait toujours avec ce sourire. Elle était embarrassée, elle n’avait certainement pas envie qu’il rentre dans son appartement, de plus, s’il l’aidait pour ses pâtisseries, et qu’il restait ensuite pour l’article, cela signifierait plusieurs heures seule avec lui. Bien sûr, son ventre se tordit d’excitation à cette pensée mais elle n’avait pas très envie de l’écouter.

“S’il vous plaît !” la supplia-t-il. “J’ai fait tout ce chemin pour venir jusque chez vous, vous n’allez tout de même pas me renvoyer ?”

Et maintenant, il essayait de toucher sa corde sensible. L’homme était doué ! Elle capitula.

“Bon, d’accord ! J’espère vraiment que vous me serez utile !” lança Vanessa en le regardant de haut en bas. Elle était quasiment certaine qu’il n’avait jamais touché une casserole de sa vie.
“Vous ne le regretterez pas !” répondit Thomas en lui offrant un sourire encore plus grand.
“Entrez !” bredouilla-t-elle en rougissant, elle cacha sa gêne en se cachant derrière sa porte d’entrée.

Thomas entra dans son appartement et fut surpris par la décoration de Noël de Vanessa. Il resta estomaqué quelques instants en voyant le grand sapin qui trônait au fond du salon, proche des fenêtres. Il clignotait de couleurs différentes. Il avança de quelques pas et aperçut les guirlandes sur les murs, les boules, les figurines, même le gui ! Il se retourna vers Vanessa qui le regardait avec appréhension. Elle n’avait pas l’habitude de faire entrer un homme dans sa maison et elle savait que son chez-elle était particulièrement girly, surtout en cette période de Noël.

“Je vois que vous adorez Noël !” fit-il d’un air moitié-railleur, moitié-impressionné.
“Oui, j’adore cette fête ! Dommage que vous ne partagiez pas cette passion !” lança-t-elle.
“Et pourquoi donc ?”
“Car vous perdez beaucoup ! J’adore Noël ”
“Mais pourquoi ? Je n’ai jamais compris tout cet engouement pour cette fête commerciale !”
“Mais Noël, ce n’est pas du tout commercial ! Vous ne pensez qu’à tous ces cadeaux que les gens s’offrent !”
“Et aussi à l’industrie des marchés de Noël, des décorations, de la nourriture festive et j’en passe ! Ne me dites pas que vous êtes aussi naïve !”
“Je ne suis pas naïve !” s’écria-t-elle, vexée. “Noël, ce n’est pas que ça ! Si je n’avais pas les moyens de m’acheter des décorations, j’adorerais quand même Noël. Car ce qui m’intéresse, ce n’est pas tout ça, mais son esprit ! Cette fête apporte énormément de bonheur aux enfants mais pas que, aux adultes aussi ! Les gens sont plus positifs et joyeux ! C’est aussi un moment où nous pouvons donner sans restriction, sans honte ! Et même si parfois, ce n’est qu’un peu, et pas besoin d’offrir une montre hors de prix ou une robe luxueuse, un peu de soutien peut parfois rendre le sourire à des gens qui en ont besoin ! L’esprit de Noël, c’est redonner de l’espoir aux gens !”

Thomas avait écouté Vanessa sans dire un mot. Il se détourna d’elle finalement. Elle s’approcha de lui.

“Pourquoi n’aimez-vous pas Noël ? J’ai l’impression qu’il n’y a pas que le côté commercial que vous n’appréciez pas, n’est-ce pas ?” demanda-t-elle d’un air prudent.

Elle savait qu’elle rentrait dans la sphère privée de Thomas Johnson et ce dernier n’aimait pas qu’on lui pose des questions trop indiscrètes. En même temps, cette fois, elle n’avait pas signé de contrat lui interdisant de l’interroger sur des choses personnelles. Elle se mit face à lui et le regarda dans les yeux. Il semblait gêné.

“Je n’aime pas Noël parce que… c’est une fête qui a toujours été... décevante…” Il détourna à nouveau le visage. Et cette fois, Vanessa sentit qu’il n’en dirait pas plus. Elle décida de changer de sujet.

“Et si nous les faisions ces muffins !” dit-elle d’une voix plus réjouie. “Donnez-moi votre manteau, s’il vous plaît ! Et votre veste également car vous risquez de vous salir !”

Thomas se déshabilla et Vanessa prit ses vêtements pour les pendre sur son porte-manteau. Puis, elle sortit un grand tablier de son placard et le lui remit entre les mains.

“Il est hors de question que je porte ça !” lança-t-il d’un air dégoûté en regardant le tablier à fleurs.
“C’est soit vous portez ça, soit vous allez vous salir ! Cuisiner, ça n’a jamais été propre comme activité ! Enfin, si cela ne vous dérange pas de mettre de la farine ou du chocolat sur votre complet Chanel, c’est comme vous voulez !”

Vanessa le regarda intensément, elle voyait bien qu’il réfléchissait. Il n’avait certes pas envie de salir à jamais ses vêtements mais porter un tablier aussi immonde semblait au-dessus de ses forces. Elle tourna les talons et entra dans sa cuisine. Finalement, Thomas la suivit, habillé du tablier ridicule. Elle faillit éclater de rire quand elle le vit ainsi habillé mais elle ne devait pas lui montrer qu’il n’était pas à son avantage dedans, sinon, elle allait le vexer. L’homme avait sa fierté. Pourtant, elle le trouvait plus attendrissant dans son tablier à fleurs.

“Alors, dites-moi ce que je dois faire !” demanda-t-il avec un sourire.
“Veuillez mesurer la farine avec ce verre doseur, il m’en faut 150 grammes ! Ensuite, vous pourrez la mettre dans ce grand bol ! Puis, vous casserez trois oeufs !” lui répondit-elle.

Thomas resta interdit pendant quelques instants. Vanessa l’observa, les yeux plissés.

“Vous n’avez jamais cassé des oeufs, c’est ça, monsieur Johnson ?”
“Euh…”

Il était très embarrassé et commença à rougir.

“Je vous ai dit que je ne savais pas cuisiner…” dit-il d’un air penaud.

Vanessa le trouva encore plus charmant.

“Ne vous inquiétez pas, je vais vous apprendre !” s’écria-t-elle en lui souriant tout en lui lançant un clin d’oeil.

Il se détendit. Après qu’il ait mesuré la farine et qu’il l’ait mise dans un grand bol, Vanessa lui montra comment casser des oeufs en lui demandant d’en casser dans un petit bol avant de les rajouter dans le grand bol.

“Surtout, faites attention à ne pas laisser de coquille !”

Thomas appliqua les conseils de Vanessa consciencieusement. Puis, il fut de corvée de mélanger la pâte pendant que Vanessa préparait une pâte à biscuits. Vanessa jetait des coups d’oeil discrets vers son invité et sourit. Voir le grand héritier Johnson aussi concentré fit cogner son coeur un peu plus fort dans sa poitrine. Elle le trouvait décidément plus charmant, habillé de son tablier, une mèche de cheveux pendant sur un côté de son visage, les yeux plissés, le visage attentif. En cet instant, il n’avait plus rien de l’homme fier et prétentieux qu’il prétendait être.

Il capta son regard et releva le regard en plongeant ses yeux gris dans les siens. Par Merlin, qu’il est beau ! ne put-elle s’empêcher de penser. Elle se ressaisit.

“Maintenant que vous avez bien mélangé la pâte, nous allons pouvoir ajouter le chocolat fondu !” dit-elle rapidement. “Attention, c’est chaud !”

Vanessa approcha une petite casserole de chocolat noir fondu et la versa doucement dans le grand bol.

“Vous pouvez mélanger mais doucement, sinon, vous allez en mettre partout sur vous et le plan de travail !”
“D’accord !” dit-il simplement.

Il reprit son travail consciencieusement sans dire un mot supplémentaire. Vanessa entendit “Douce nuit” en musique de fond et ne put s’empêcher de chanter doucement.

“Vous avez une très jolie voix !” ne put s’empêcher de dire Thomas qui avait relevé la tête vers elle.
“Oh… merci !” dit-elle en rougissant. “J’adore les chansons de Noël !”
“C’est ce que j’avais compris !” rit-il.
“Oui, désolée ! C’est ma playlist spéciale Noël ! Vous voulez peut-être écouter autre chose ?”
“Non, pas du tout ! Cela me va ! Surtout si vous continuez à chanter !”
“Euh…”

Vanessa sentit son visage devenir rouge pivoine.

“Vous… avez fini de mélanger la pâte ?” demanda-t-elle en tentant d’effacer sa gêne.
“Oui, regardez ! Est-ce que cela vous convient ?”
“C’est parfait ! Nous allons maintenant la mettre dans des moules ! Laissez-moi faire !”

Elle répartit la pâte à muffins dans douze moules qu’elle avait beurré à l’avance. Thomas la regarda faire d’un air impressionné. De toute sa vie, il n’avait jamais vu une seule personne cuisiner, on lui avait toujours préparé ses plats et il n’était jamais entré une seule fois dans la cuisine de son manoir. Quand la pâte fut enfin répartie, Vanessa les mit dans son four déjà chaud et activa un minuteur.

“Dans vingt minutes, ce sera cuit ! Maintenant, faites la même chose, sauf que cette fois, au lieu de cuisiner des muffins au chocolat, on fera des muffins aux myrtilles !”

Ils continuèrent encore pendant deux heures. Pendant qu’ils cuisinaient, Vanessa avait débouché une bouteille de vin rouge et ils cuisinaient tout en sirotant leur vin. L’ambiance était de plus en plus détendue et ils partageaient des anecdotes de leur vie. Elle apprit qu’en effet, Thomas n’avait jamais cuisiné de sa vie auparavant, que sa mère avait été très stricte quand il était enfant et qu’il avait passé une partie de sa vie à se rebeller contre les contraintes de son statut. Il avait fait le tour du monde pendant trois ans et ne s’était pas rasé pendant toute cette période. Vanessa exigea une photo qu’il refusa de lui donner. Il y a deux ans, malheureusement, son destin d’héritier l’avait rattrapé. Ses parents étaient décédés d’un tragique accident et étant l’unique héritier, il avait dû revenir à la réalité de ses devoirs.

Vanessa lui raconta également son enfance heureuse. Elle adorait lire, écrire et surtout cuisiner. C’était une passion qu’elle partageait avec sa mère. Malheureusement, elle n’avait pas eu une vie aussi intense que Thomas. Après ses études, elle était juste montée dans la capitale et avait commencé à travailler. Elle aurait aimé faire le tour du monde comme lui mais elle n’en avait pas les moyens. Peut-être un jour, quand elle aurait assez d’argent, pourrait-elle réaliser ce rêve.

Finalement, ils réussirent à cuisiner une cinquantaine de muffins et commençaient désormais les biscuits au beurre. Thomas s’était amusé à créer des formes assez farfelues alors que Vanessa était restée dans le standard. Elle découpa des biscuits en forme d’étoile, de bonhomme de neige, de cerf ou de sapin. Elle jeta un oeil au-dessus de l’épaule de Thomas.

“C’est quoi cette forme ?” lui demanda-t-elle en voyant une forme longue.
“C’est un palmier !” répondit-il fier de lui.
“Un palmier ? Vraiment ? On dirait plutôt une forme de baguette de pain bizarrement recourbée sur elle-même !”
“Mais pas du tout ! Vous voyez, là, ce sont les grandes feuilles du palmier, et là, son tronc !”
“N’importe quoi ! Et c’est quoi cette autre forme ?” s’écria-t-elle en pointant sur un autre biscuit bizarre.
“C’est un coeur !” dit-il en rougissant.
“Un coeur, ça ? Mais ça ressemble à un rond. Regardez, c’est comme ça qu’on fait un coeur !”

Et avec son couteau, elle corrigea la forme ronde pour lui rendre une réelle forme de coeur.

“Et voilà !”
“Pff…!”

Elle éclata de rire.

“Découper un coeur ? Je ne vous savais pas aussi romantique, monsieur Johnson ! On fait des biscuits de Noël, pas des biscuits pour la Saint Valentin !”
“Ne vous moquez pas, mademoiselle Bale ! Je suis quelqu’un de très romantique ! Et appelez-moi Thomas !”

Vanessa continua à rire.

“Je demande à voir ! D’accord pour Thomas, mais seulement si vous m’appelez Vanessa !”

Thomas sourit.

“D’accord ! Et si vous aviez accepté ma proposition de dîner, vous auriez vu quel homme romantique je suis !”
“Oh, j’imagine que pour vous, être romantique, c’est réserver un restaurant entier pour vous seul où vous inviteriez votre belle et lui proposeriez les plats les plus raffinés ! Vous termineriez le repas par lui offrir mille roses rouges !”
“Et alors, ce n’est pas romantique, ça ?” s’écria-t-il d’un air légèrement vexé.
“Il y a dix-mille façons d’être romantique, Thomas ! Et toutes ne comportent pas forcément de l’argent ! Pour moi, ce serait de l’argent jeté par les fenêtres ! Je préfère largement une balade au clair de lune ou boire un chocolat chaud avec ma moitié au coin du feu ! C’est cent fois plus romantique !”

Thomas resta quelques instants dubitatif.

“C’est si romantique que ça de boire du chocolat chaud devant une cheminée ?”
“Si vous êtes avec la personne que vous aimez, bien sûr que c’est romantique !” s’exclama-t-elle d’une voix assurée. “Vous avez encore beaucoup de choses à apprendre de ce côté-là !”

Il ne s’en offusqua pas car il se rapprocha de Vanessa.

“Alors, apprenez-les moi !” dit-il avec ferveur.
“Qu… Comment ?”

Elle avait agrandi ses yeux. Qu’entendait-il par-là ? Thomas se rendit enfin compte de ce qu’il avait dit en voyant le visage de Vanessa et se rétracta.

“Excusez-moi !”

Il se détourna d’elle et finit de découper la pâte à biscuits.

Les biscuits désormais au four et leur tabliers enlevés, ils s’installèrent sur le canapé pour jeter un oeil sur l’article de Vanessa.

“Franchement, vous ne m’avez pas montré sous mon meilleur jour !” lui lança-t-il sur un ton railleur.
“Comment ça ?” demanda-t-elle d’un air innocent.

Il lut quelques passages de son article à voix haute : “Thomas Johnson, cet homme de premier abord séduisant avec son sourire charmeur, n’est en réalité qu’un chef d’entreprise avisé, consciencieux et soucieux de son image”, “Son projet d’hôpital dans un quartier défavorisé semble trop beau pour être vrai. Chaussé de ses Paul Smith, il n’a certainement jamais foulé les rues de Peckham et ne connaît pas la réalité de ce district”, “En creusant un peu, on se rend vite compte que le projet n’est en réalité qu’une transaction financière…”

“Honnêtement, quand j’ai lu votre article hier au petit-déjeuner, j’ai failli m’étouffer !” s’écria-t-il.

Vanessa se sentit subitement mal à l’aise. Était-elle allée trop loin ? Devant son embarras, Thomas éclata de rire. Elle le regarda surprise.

“Pourquoi rigolez-vous ?” l’interrogea-t-elle, incertaine.
“Je préfère cent fois lire un article tel que le vôtre que ceux qu’on nous propose dans The Guardian, qui sont toujours trop lisses et trop politiquement corrects ! J’avoue avoir tiqué quand vous avez dit que je n’étais soucieux que de mon image mais vous vous êtes rattrapée en disant également que j’étais séduisant ! Donc, cela me va !”

Il lui fit un clin d’oeil. Elle rougit.

Finalement, Thomas n’avait pas beaucoup de commentaires à faire sur son article. Il pinailla sur deux-trois choses mais en réalité, cela ne justifiait pas sa venue jusque chez elle. Néanmoins, Vanessa n’était plus offusquée. Elle avait apprécié qu’il cuisine avec elle car elle l’avait vu sous un nouveau jour.

“Qu’allez-vous faire de toutes ces pâtisseries ? Vous ferez une vente demain ?” demanda-t-il alors qu’il rangeait l’article dans l’enveloppe en kraft.
“Non, pas du tout !” s’écria-t-elle. “Je compte les distribuer à des enfants dans des hôpitaux du quartier.
“Vraiment ?”
“Oui, ce sont des enfants qui ont de graves maladies et qui restent continuellement à l’hôpital. Je vais les visiter dans leur chambre et leur donner un muffin et un paquet de biscuits ! J’ai crocheté ça aussi, ces derniers mois, en vue de cette visite !”

Vanessa attrapa une boîte en carton qui était posée à côté du canapé et l’ouvrit devant Thomas. Il y découvrit des amigurumi de forme et de taille différente : des lapins, des oiseaux, des tortues, des baleines… Thomas attrapa l’une des petites peluches et l’admira.

“C’est magnifique !” lança-t-il d’un ton appréciateur.
“Oh, ce n’est pas grand chose !” répondit-elle simplement. “J’en donnerai un à chaque enfant, avec les gâteaux. Cela risque d’être une longue journée !”
“Puis-je vous accompagner ?”
“Euh… vous voulez m’accompagner ?” l’interrogea-t-elle d’un air surpris.
“Oui, cela m’intéresse de rencontrer ces enfants. Et je vous avoue, maintenant que j’ai cuisiné ces pâtisseries, j’aimerais savoir si les personnes à qui vous allez les donner les aimeront ! Je n’ai jamais fait ça ! Et j’aimerais vraiment connaître un peu plus votre quotidien !”

Vanessa le regarda intensément. Quelques heures auparavant, elle aurait certainement refusé qu’il l’accompagne mais après la soirée qu’ils venaient de passer, son opinion sur l’homme avait changé. Ses yeux gris étaient sincères. De plus, son coeur criait qu’elle avait très envie de le revoir. Partager ce moment avec lui serait sûrement très instructif et l’aiderait certainement à mieux le connaître.

“D’accord” dit-elle finalement.

Thomas lui lança un large sourire qui fit encore plus palpiter le coeur de Vanessa.
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