Vérifiant que Valérie était désormais occupée à persuader Victor de regarder un Disney avec elle, Viviane s’éclipsa du salon. Elle mit ses bottes et sa veste et sortit dans l’air froid de cette fin de novembre.
La maison de ses parents n’était pas très grande mais pas petite non plus. Elle se trouvait au bout d’une impasse dans un quartier plutôt tranquille dont la moyenne d’âge devait se situer à soixante ans. Comme toutes les maisons de la rue, le numéro 27 avait un garage. Mais Luc Torset l’avait transformé en atelier dès que sa femme l’avait chassé de la pièce qui était maintenant la chambre d’amis – avant, c’était la chambre de Valérie qui faisait office de chambre d’amis. Et donc la voiture familiale était garée sur la route, ce qui était théoriquement interdit mais ne dérangeait personne puisqu’il n’y avait presque pas de circulation.
Viviane essuya en passant la petite lanterne qui éclairait le chemin entre maison et garage pendant la nuit. Il avait plu mais maintenant seuls des nuages gris peuplaient le ciel. Un après-midi somme toute assez normal en novembre.
Le garage n'était pas chauffé mais elle fut néanmoins soulagée d'échapper au vent d'est qui refroidissait plus qu'un. Son père n'avait pas dû l'entendre entrer, du moins il ne se précipitait pas pour cacher les cadeaux fraîchement fabriqués. La maison de poupée pour Valérie, par exemple, prenait de plus en plus forme. Victor devait obtenir une étagère pour ses CDs. Et le cadeau de sa mère se trouvait encore au stade d'un parallélépipède de bois de cerisier. Malheureusement elle n'avait pas encore pu découvrir ce qu’elle-même allait avoir. Une nouvelle bibliothèque ne rentrerait pas dans sa chambre…
– Coucou, papa !
– Coucou, ma grande ! L'homme aux cheveux bruns se retournait avec un grand sourire. Que veux-tu à ton vieux père ?
– Je ne viens pas seulement quand je veux quelque chose, s'offusqua Viviane.
Luc Torset enleva ses gants de travail pour ébouriffer les boucles blondes de sa fille. Celle-ci rigola puis dévisagea le jouet en bois qu’il était en train de construire. La maisonnette était déjà presque finie.
Le bois clair qui constituait les murs était recouvert de petits bouts de papiers peints. Viviane reconnaissait un bon nombre d'entre eux. Là, un morceau datant de la rénovation du salon, là un de la chambre d'amis des grands-parents. La salle de bain était même carrelée avec des petits carreaux de mosaïques sur les murs. Le toit, lui aussi en bois, avait des reflets humides comme si la peinture rouge n’avait pas encore eu le temps de sécher.
– Tu pourrais ajouter une étable ou une niche pour chien, commenta Viviane. Mais c'est très beau. Valérie va être contente.
– Jalouse ? Son père lui adressa un clin d'œil. J'espère bien que ça lui plaira.
Viviane rigola encore. Son père la connaissait trop bien. Elle s'installa sur un des tabourets qui n'étaient pas encombrés et observa son père ajouter les fenêtres et les portes aux endroits qu'il avait prévu pour. Qu'est-ce qu'il était agile malgré ses gros doigts ! Mais en fait elle était venue lui demander quelque chose.
– Dis-moi, papa, tu n'aurais pas vu la liste de courses de maman ce matin ?
Son père s'interrompit et la regarda, sceptique.
– Tu cherches vraiment une liste pour ta mère ?
– Elle disait qu'elle avait peut-être été volée !
Mais en disant cela, Viviane savait bien que ce n'était pas une bonne raison. Ni même très réaliste. Mais bon hein, son père disait toujours qu'elle passait trop de temps plongée dans des livres, qu'il ne se plaigne pas quand elle faisait autre chose, alors.
– Tu as déjà fait ta liste de vœux ? interrogea Luc d'un air conciliant.
Viviane se figea. Elle n'y avait pas du tout pensé ! Et elle supposait que Valérie non plus puisqu'elle réclamait toujours encore son aide. Tandis que Victor… Si leurs parents les avaient déjà réclamées une fois, il devait l'avoir finie.
– Non, avoua-t-elle. Et Valérie non plus…
– Vas vite la faire alors, le Père Noël en aura besoin dès que possible.
Viviane lui sourit. Comme si elle croyait encore au Père Noël ! Mais il n'y avait plus de temps à perdre, ses parents étaient tout à fait capables de ne rien lui offrir si elle ne rendait pas sa liste de vœux. La jeune fille retourna dans la maison chaude.
– Valérie ! Faut qu'on fasse nos listes pour le Père Noël !
Bah oui, sa sœur y croyait encore, elle n'allait pas lui révéler la vérité ! Quoique Victor l'avait peut-être déjà fait.
– Ouiiii ! Viviii !
La tornade rose qu'était sa sœur se précipita sur elle. L'aînée n'eut que le temps de s'accrocher à la rambarde de l'escalier pour encaisser la collision. Apparemment Victor avait refusé de regarder un film. Rien que pour l'embêter, Viviane traîna sa sœur dans le salon.
– Tu demandes quoi pour Noël ? demanda-t-elle à son frère encore en train d'écouter de la musique.
– Des sœurs muettes et un casque, répondit Victor, agacé.
Viviane leva les yeux au ciel et sortit des feuilles et des feutres pour Valérie et elle.
– Et toi, Valérie ?
Sa petite sœur leva un regard plein d'innocence sur elle et saisit le feutre violet pour inscrire son nom en haut d'une feuille.
– Je veux un chien.
Eh bien, elles n'étaient pas sorties de l'auberge avec ce départ. Mais elle pouvait tout aussi bien laisser ses parents se débrouiller en fait. Viviane sourit à sa sœur et entreprit d'inscrire quelques titres de livres sur sa propre feuille. Même si pour le moment elle avait mis en pause la recherche de la liste de courses, elle ne l’abandonnerait pas.
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Notes d'auteur :
Thème : chien
Bonne lecture !
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