C’était une belle journée et Roselyne était bien décidée à parfaire son bronzage au bord de la piscine après le déjeuner. Elle dressait la table de la cuisine pour le repas de midi lorsqu’elle entendit sonner son téléphone portable, resté dans le salon. C’était un texto.
Elle saisit son téléphone, s’assit confortablement dans son canapé et commença sa lecture :
« Roselyne, je t’ai envoyé un mail avec des documents en pièces jointes, je pense que cela pourrait t’intéresser - Mathias. »
Intriguée, elle consulta ses messages et parcourut avec scepticisme les documents envoyés par son fils, puis resta assise un moment, perdue dans ses pensées. Elle se leva ensuite énergiquement pour prendre son sac à main et ses clés de voiture.
Au volant, Roselyne ne pouvait s’empêcher de ressasser le contenue des documents. Était – ce vrai ? Si c’était le cas, tout était remis en question et il lui devait des explications.
C’est avec une grande fébrilité qu’elle s’apprêtait à faire irruption chez Richard lorsqu’elle fut freinée dans son élan par la voix de ce dernier discutant dans le salon avec un autre homme. Elle décida alors d’écouter discrètement leur conversation en se plaçant sous une fenêtre.
— Alors comme ça elle t’a quitté ?
— Je pense que c’est rattrapable, ce n’est pas la première fois qu’elle me fait le coup.
Roselyne n’avait jamais entendu cette voix auparavant. Elle semblait jeune et peu assurée face à Richard, ce qui l’intrigua un peu plus.
— Tu aurais dû être plus attentionné avec elle, je sais que ce n’est pas facile de feindre des sentiments mais quand même ! D’autant plus que tu devais les empêcher de se rencontrer et apprendre ce que sa famille savait.
— Comme je vous l’ai déjà dit, ils ne savent rien. La seule chose étrange était les contacts dans ses rêves que je m’efforçais de faire passer pour des cauchemars sans importance. Vous dîtes qu’ils se sont rencontrés ?
— Oh que oui et je peux te dire qu’ils se rapprochent un peu plus tous les jours.
Il y eut un silence. Roselyne attribua cela au choc que le jeune homme avait reçu par cette nouvelle.
— Il faut croire que tu n’avais pas tant d’emprise sur elle. Il va falloir passer à la vitesse supérieure. Je veux que tu ailles sur l’île, sans te faire voir bien sûr, et que tu me débarrasses de cette gêneuse. On m’a rapporté que Kenneth l’a laissé filer, prête-lui main forte pour la retrouver et tant qu’à faire, occupe-toi aussi de l’enquêteur, Mathias. Tu peux disposer.
Le jeune homme ne répondit pas, mais Roselyne put entendre ses pas se diriger vers la sortie. Elle eut juste le temps de se cacher dans les hortensias longeant l’entrée et ainsi voir l’homme de dos. Blond, les cheveux courts, habillé d’un pantalon de costume et d’une chemisette, elle ne l’avait jamais vu auparavant.
Plus remonté que jamais, elle pénétra dans la maison et se dirigea vers Richard qui ne put cacher sa surprise.
— Que fais-tu ici ? Nous allons partir pour la réunion du grand cercle, lui dit-il.
— Tu m’as menti depuis le début espèce de salaud !
— Mais de quoi parles-tu ?
— De Christian, c’est toi qui l’as fait assassiner.
— Je ne connais pas de Christian, as-tu perdu la raison ?
— Tu ne connais même pas son nom ? Tu me répugnes ! Le comptable que tu as fait assassiner en me laissant croire que c’était Pierre le responsable.
— Écoute, tu te méprends, je n’ai jamais rien fait à cet homme. Par contre, on a effectivement toujours soupçonné Pierre.
— Arrête, je vois clair maintenant, tu m’as manipulée. Tu es prêt à tout pour parvenir à tes fins… Même liquider ton frère.
— Il n’a jamais été question de tuer Pierre. J’estime seulement qu’il ne doit pas devenir notre chef. Lui et ses idées seraient dangereux pour tous les Guides.
— Je ne parle pas de Pierre, mais de Victor.
Richard ne put rien répondre. Son visage se crispa et il se contenta de la fixer droit dans les yeux avant que son regard ne soit attiré par un autre point derrière elle.
— Ne fais pas ça ! hurla-t-il en se précipitant vers Roselyne.
Cette dernière se retourna alors et vit Rose avec un vase à la main, qu’elle lui fracassa sur le crâne. La mère de Mathias s’effondra aussitôt sur le tapis.
— Qu’as-tu fait ? balbutia Richard.
— Elle savait. Nous sommes allés trop loin pour faire marche arrière maintenant. Nous n’avons pas fait ces sacrifices pour qu’elle vienne tout gâcher. Je téléphonerai à Patrick dans la voiture pour qu’il s’occupe du corps, finit-elle froidement.
— Elle est peut-être en vie, on ne peut pas la laisser ainsi, s’exclama Richard.
— Je t’ai connu moins scrupuleux.
Rose s’approcha alors de son mari avec qui elle vivait depuis plus de cinquante ans.
— Je sais que tu n’aimes pas te salir les mains, mais il n’y a plus de retour possible.
Elle posa ensuite ses mains sur les joues de Richard pour le rassurer.
— Bientôt, tu seras notre chef et tout ceci ne sera qu’un mauvais souvenir. Nous devons partir.
Avec un sang-froid inquiétant, Rose prit son mari par le bras et l’entraîna dehors, où leur chauffeur les attendait pour les conduire à l’aéroport, laissant Roselyne gésir sur le tapis du salon. Richard la suivit sans dire un mot car il savait qu’elle avait raison, c’était le prix à payer pour être le nouveau dirigeant. Il avait toujours voulu le pouvoir et pour l’obtenir, il devait mettre de côté ses états d’âme. Une fois installée dans la voiture, Rose appela son fils.
— Patrick, c’est ta mère, où es-tu ?
— Bonjour mère… Je suis à la maison, j’allais partir pour l’hôpital, pourquoi ?
— Ton père et moi avons besoin de ton aide. Roselyne a eu une sorte de… Un accident chez nous.
— Quoi !! Que s’est-il passé ?
— Elle a en quelque sorte… Glissé. Je ne peux pas t’expliquer maintenant nous sommes en route pour l’aéroport. Contacte quelques hommes et va avec eux pour t’assurer qu’on… S’occupe d’elle.
— Mais est-ce qu’elle est….
— Oui. Je dois te laisser mon fils. Nous comptons sur toi.
Elle replaça ensuite son téléphone là où elle l’avait pris et se tourna vers Richard.
— Ne fais pas cette tête, j’ai raison, n’est-ce pas ?
— Tu as raison Rose.
— Te souviens-tu, il y a plus de quarante ans, lorsque la devineresse nous a annoncé notre perte à cause du fils de Roselyne et de la descendance de Pierre ? J’ai su qu’il fallait faire quelque chose. J’ai engagé un homme pour supprimer l’amant de Roselyne, ce petit comptable.
— C’est toi qui as commandité son meurtre ? s’exclama Richard.
— Je pensais ainsi empêcher Roselyne d’avoir un fils et ensuite quand nous avons su que Pierre et sa femme n’auraient pas d’enfant, je nous croyais sauvés.
— Et tu ne savais pas que le comptable falsifiait des documents pour moi.
— Pas du tout.
— Sa mort a alerté Victor, qui a fini par se douter de quelque chose. Je suis désolé ma Rose de ne t’avoir rien dit.
— Ce n’est rien. L’important c’est que tu n’as pas hésité lorsqu’il a fallu prendre une décision concernant Victor. Tu l’as fait. Tu es né pour être notre chef. Je dirais même, notre chef désigné.
— C’est vrai. Après cela, je ne peux que réussir. L’échec n’est pas une option.
— À cet instant, je tiens à toi plus que jamais. Ton père était faible. Quand il a su pour la liaison de Pierre qu’a-t-il fait ? Il lui a juste imposé d’aller te rejoindre en Grande-Bretagne et d’épouser Antoinette. C’est cette Françoise que j’aurais dû faire disparaître. Sans son bâtard de fils, nous n’en serions pas là. Nous devons nous battre encore. Tu seras le chef et je serai ta conseillère. À nous deux, nous allons redonner ses lettres de noblesse à notre branche et très vite, à toutes les autres.
— Que ferais-je sans toi ? Je n’aurais jamais eu le courage pour Victor si tu n’avais pas été là. Décidément, l’adage dit vrai : derrière chaque grand homme, se cache une femme.
— Nous devons nous débarrasser de cette Maïwenn et de l’enquêteur par la même occasion.
— J’ai déjà envoyé quelqu’un s’en charger.
— Je t’adore, dit Rose les yeux remplis d’admiration, avant de poser un baiser sur sa joue.
Patrick n’avait jamais tenu tête à sa mère, pour preuve ce mariage qu’il avait accepté à contre cœur et qu’il subissait comme une punition. Lorsque sa mère lui avait parlé de la venue de Françoise dans son hôpital, c’est avec beaucoup de zèle qu’il avait exécuté sa tâche.
Pour qui se prenaient Victor et Pierre avec leur invention ? Pourquoi ne pas exposer les Guides au grand jour tant qu’à faire ? Pour la cause, il avait accepté un mariage de convenance. Hors de question qu’il ait gâché sa vie pour rien, ruminait-il.
Le médecin reposa ses affaires, plus question d’aller à l’hôpital. Il s’assit sur une chaise de la cuisine, posa ses coudes sur la table et réfléchit à la situation. Ce qu’il s’apprêtait à faire était risqué, il en était conscient, beaucoup plus risqué que de changer les médicaments d’une vieille dame pour la faire taire.
Lorsqu’il sortit de ses pensées, une demi-heure s’était déjà écoulée et il fallait qu’il se décide vite. À bien y réfléchir lui aussi était mouillé jusqu’au cou dans cette histoire et la perspective de contrarier sa mère l’effrayait bien plus que les éventuelles poursuites judiciaires.
Sa décision était prise, le corps de Roselyne devait disparaître et pour cela, il contacta des Varlarc’h à la solde de Richard pour qu’ils se chargent de la basse besogne.
C’est tout de même avec une certaine appréhension qu’il arriva devant le porche de la maison où un homme l’attendait, les autres étant déjà à l’intérieur.
L’anxiété qu’éprouvait Patrick quant à ce qu’il allait trouver lui passa vite, car le Varlarc’h avait une nouvelle surprenante à lui annoncer.
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Notes d'auteur :
Et je continue à poster, même si je ne suis pas persuadée qu'arrivé à ce nombre de chapitre, vous ayez encore le courage de lire!
Enfin, s'il y a quelques personnes perdues sur cette histoire et bien...merci! :-p
Enfin, s'il y a quelques personnes perdues sur cette histoire et bien...merci! :-p
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