Le devin de l’Empire des Cités Rouges n’avait rien mentionné de tel. Comment se pouvait-il que lui ne soit pas informé de l’existence d’un passage secret au cœur même du saint sépulcre ? À ce moment, la question restait sans réponse sur les lèvres de la jeune prétorienne. Mais, elle ne tarderait pas à connaître la vérité, se jurait-elle.
La flamme léchait la pierre blanche et nacrée, laissant des zébrures noires sur le contour de l’ouverture qu’elle cherchait à déterminer. Peut-être avait-il connaissance de ce passage et le lui avait caché pour… la jauger ?
Il fallait être de petite taille pour l’emprunter, à en croire le dessin sombre délimitant la porte de pierre.
Assurez-vous que leur sommeil n’ait jamais été perturbé, lui avait dit et redit le devin de diverses manières. Toutes ces phrases, était-ce pour l’embrumer ? Car si elle n’avait pas chuté, jamais elle n’aurait concentré son attention sur le mur.
Maintenant que le passage était surligné de dépôts carbonés, restait le plus difficile à trouver. Où pouvait bien être dissimulé le moyen de l’ouvrir ? Tous ces visages, déformés par la souffrance et le plaisir, offraient tellement de possibilités.
– Pas la peine de penser que je vais m’en aller, Chèl Mosasteh. Je trouverai la clef.
Elle parlait à voix haute, comme s’il se trouvait assis derrière elle, ses fesses saillantes de vieillard sur le bénitier géant. C’était une façon comme une autre de lutter contre la peur montante qu’inspiraient les mystères qu’elle trouverait derrière.
– Vous croyiez que glisser mes doigts dans toutes ces bouches hurlantes, ces orbites creuses et ces narines étirées, allait me rebuter ? Il m’en faut plus que ça ! Ne l’aviez-vous pas vu dans l’une de vos visions nocturnes ? Vous étiez si certain que mon jeune âge me ferait passer à côté du plus important… de votre machiavélique plan ?
Ses doigts fouillaient chaque recoin, avec la plus grande délicatesse, pour s’assurer de n’être pas passés à côté d’un loquet, d’un bouton-poussoir ou de tout autre mécanisme intelligemment dissimulé.
– Vous ne m’avez pas fait venir jusqu’ici que pour me faire valider que vous vous trompiez…
Mais Tahiriana ne croyait plus à ce que sa haine envers le devin lui dictait. Cela ne tenait pas debout. Chèl Mosasteh ne devrait même pas prendre la peine de le lui dire pour qu’elle s’en convainque. Non, le devin ne connaissait pas lui-même l’existence de ce passage, arriva-t-elle à conclure alors même que son index venait de sentir, au fond d’une bouche, une partie amovible. Par conséquent, ce qu’elle trouverait derrière risquait d’être de taille à la surprendre. La salive fut produite en quantité dans sa bouche. Et de nervosité, Tahiriana déglutit à deux reprises.
– Je ne suis pas assez protégée pour continuer. Il me faut remonter et descendre mon armure pour m’équiper, tentait-elle de se répéter, en murmure, afin de repousser le moment où elle appuierait sur le bouton.
– Je ne suis pas… continuait la prétorienne de se dire, tout en serrant fort son cierge, comme si c’était la garde de son épée. Épée qu’elle ne pouvait à ce moment tenir, puisque l’autre main hésitait à enfoncer le bouton.
– … assez protégée.
Mais l’envie de percer le mystère fut plus grande que toute considération de garder sa vie du mal qu’elle pourrait révéler.
Elle appuya.