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UN ENFANT PEUT EN CACHER UN AUTRE


La coupole des Trilunes d’Ildebée était une tour assez haute pour observer au-delà des murs de la cité, marquant la frontière entre l’Empire et les Conquérants. Une tour assez haute, où de là, le devin avait dû se repaitre du massacre de sa sœur. Tahiriana chassa vite ces mauvaises pensées qui ne faisaient que la détourner de sa mission.


« Concentre-toi. Au dire de Dreik, le devin redoute une menace plus grande encore que la guerre qui a déchiré notre peuple, se répétait-elle, chaque fois que l’envie de se venger montait. »


Il était assez simple de la regarder, cette tour. Mais d’y accéder, était une tout autre histoire. Une fois à l’intérieur de la cité, elle comprit que l’édifice était enchâssé au sein même des murs d’une forteresse. Pour y entrer, il fallait d’abord traverser un long pont de pierre qui chevauchait des douves gardées de trois herses, qui fort heureusement, en ces temps de paix, restaient relevées. Seuls des couples de gardes figuraient en obstacles sous chacune des arches.


Quand elle s’approcha du pont, les premiers croisèrent leur fauchard, une sorte d’arme d’hast munie d’une longue lame courbe en son bout. Tahiriana se souvint du passage, lorsque le devin lui avait remis le sésame, et sortit, d’une bourse, une médaille qu’elle rechignait à porter autour de son cou. Pour sûr, elle était gravée du heaume du Magnus Kéol, symbole de la plus haute autorité militaire. Et, à chaque fois qu’elle le sortait, l’éclat dans l’œil, enchâssé d’un rubis, brillait dans la pupille des observateurs, au point de leur enlever toute velléité et de les rendre aussi serviles que les plus bas esclaves. Ce sentiment de toute-puissance résonnait en elle. Et faire plier des subordonnés de l’Empire, commençait à lui plaire. Les deux fauchards cinglèrent en se séparant, lui ouvrant la voie.


Derrière elle, sur la place de la cité, des gens l’observaient. Mais, elle n’en avait cure. Car s’il devait y avoir, parmi eux, un espion d’un soi-disant culte secret, il ne pouvait être en possession d’une telle médaille. Passant les arches menant aux portes de la forteresse d’Ildebée, Tahiriana allait bientôt entrer dans le havre des puissants. Même si elle portait le laissez-passer impérial, elle n’en était pas moins obligée d’attendre l’officier préposé qui accèdera à ses demandes.


 – Quelle est la raison de votre visite ? questionna une femme bardée d’une cotte d’écailles.


– Je viens visiter la coupole des Trilunes.


À ces mots, la chef des gardes sembla dubitative quant à laisser passer une étrangère à l’armée de l’Empire.


– Ce n’est point un lieu ouvert au peuple, lui répondit-elle, d’un ton qui ne laissait guère place à une autre opportunité.


Mais, Tahiriana s’y attendait. Et pour se délecter de ce qui allait suivre, elle plaqua, sur la table qui la séparait de son interlocutrice, la médaille à l’œil écarlate, puis ajouta :


– Sur ordre de son éminence le devin impérial des neuf Cités Rouges.


Tout le poids de la hiérarchie venait de s’abattre sur les frêles épaules de la sarénor et la panique gagna de lui rougir les joues. Elle tourna la tête en tous sens, cherchant quelqu’un pouvant porter son message. Ne trouvant autre âme que l’un des deux gardes flanquant la porte d’entrée, elle se rapprocha de lui, pour lui glisser un message à voix basse. L’homme partit aussitôt dans la cour. Mais, l’accès à la forteresse restait toujours fermé.


– Alors ? insista Tahiriana qui n’avait nullement envie d’attendre comme un vulgaire colporteur.


– Pardon… dit la chef en inclinant la tête, tout en l’invitant à entrer.


– Voulez-vous qu’on prenne soin de votre monture ? Des écuries en sous-sol la soulageront de la chaleur.


Il est vrai que le soleil avait cette fâcheuse habitude de déjà la cuire à l’étouffée dans son armure. Et Torie, sa jument à la belle robe noire, souffrait beaucoup de ce nouveau climat. Tahiriana acquiesça sans mot dire, juste en opinant du chef, et lâcha la bride de son cheval. Puis, afin d’en apprendre plus sur les bâtiments défensifs de l’Empire, elle scruta les murs de son regard dur.


– Qui dois-je annoncer au torénor de la forteresse d’Ildebée ? hésita à demander la chef des gardes.


– Tahiriana. Mais, je suis ici pour visiter la coupole des Trilunes. Le torénor de ce lieu m’importe peu.


La prétorienne de Kisadyn commençait à s’impatienter des lourdeurs de l’étiquette, sachant la longue tâche qui l’attendait. La sarénor hésita et finit par dire :


– Alors, je fais prévenir le haut chambellan. Mais, il est d’un âge vénérable et je vous prie de garder patience.


Telles étaient les réalités du terrain. Et Tahiriana, pour ne pas perdre de sa superbe, resta debout, au cœur de la cour principale, bien en vue et en plein soleil.

Note de fin de chapitre:

Depuis 2018, nous publions la saga YURLH sur HPF. Nous préparons un financement participatif en 2025. On a besoin de toi pour faire de ce rêve une réalité : un roman papier.

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