« Monsieur,
Je suis au regret de vous annoncer une bien triste nouvelle.
Je n’ai jamais été votre petite amie, je n’ai jamais couché avec vous, je n’ai jamais posé mes lèvres sur les vôtres, ni glissé ma langue dans votre bouche.
Je n’ai même jamais eu un soupçon de début d’une larmichette d’envie de ce genre là avec vous.
Ne souffrant pas d’Alzheimer précoce, je doute fort avoir pu oublier tous ces délicieux moments?
Ayant eu toutefois un doute sur ma santé mentale, j’ai préféré consulter rapidement un spécialiste, et Dieu soit loué, tout danger est écarté.
Mon médecin peut vous recommander avec diligence à l’un de ses confrères, lequel a des résultats spectaculaires sur des patients souffrant d’érotomanie et de mythomanie.
Sachez cependant que personne n’est dupe quant à vos affabulations, vous ne manquez certes pas d’audace, je vous le concède, mais vous manquez cruellement de crédibilité; quant aux autres, ils ne manquent pas de bon sens, fort heureusement.
J’avais bien constaté qu’il vous était arrivé de vous engaillardir, comme par hasard lorsque nous étions en public, avec de maladroites tentatives de gestes tendres d’ « amitié » ( chose que vous n’avez jamais osé faire lorsqu’il n’y avait pas de public), peut-être afin de marquer votre « territoire » et de laisser supputer que j’étais votre.
Mais non. Je suis mienne. Je suis mienne mienne mienne. Et lorsque une femme ne vient pas vers vous spontanément ; lorsqu’elle retire sa main, retire son bras, retire son dos, lorsque votre main tente de s’y attarder timidement, cela veut bien dire : je ne suis guère intéressée par vos faveurs, veuillez rester à votre place.
D’autant plus lorsqu’ elle le verbalise clairement… Quelle indécence !
Mon côté actrice narcissique pourrait être très honoré d’être au centre de vos fantasmes, néanmoins, ne tenant pas à être accusée d’emploi fictif, je suis au regret de devoir vous annoncer qu’il va falloir vous réveiller... Outch! Oui c’est moi qui vous pince là. Ce rêve bleu s’achève maintenant. Réveillez-vous !!!
Voilà ! Bienvenue dans la réalité, vous verrez c’est sympa aussi! Mais c’est sans moi.
Hélas on ne peut pas tout avoir dans la vie! Et surtout on ne peut pas forcer les gens à tomber amoureux de vous.
Sachez aussi que je n’ai pas pour habitude d'écarter les cuisses pour remercier ou faire plaisir à mes " amis ", et Dieu sait à quel point j'aime les écarter pourtant, mais c’est à moi que cela doit faire plaisir avant tout, eh oui… je ne suis qu’une petite catin égoïste.
Certains se plaisent à dire que " l’appétit vient en mangeant " …
Me concernant, l’appétit me vient uniquement lorsque j'ai faim.
Je doute fort que vous fussiez tenté vous-même de passer la nuit, voire votre vie avec vous, si vous en aviez le choix ; il se trouve que vous ne l’avez pas. Et c’est ce qui vous rend amer, mon refus vous confronte à votre réalité, réalité que vous connaissez pourtant, mais que je vous force à voir en face. Et dans ma grande mansuétude, j’espère que cela vous aidera à vous mettre un coup de fouet.
Je suis aussi au regret de vous annoncer, que, n’ayant pas été informée que nous étions " en couple "... Eh bien je vous ai trompé, régulièrement, avec allégresse, et sans remords, ces derniers mois.
Je vous saurai gré de cesser séance tenante de me faire vivre dans votre imagination très fertile, des histoires, certes fabuleuses pour vous, mais très désagréables pour moi, ce qui s'apparente clairement à un viol virtuel, mais néanmoins condamnable.
Ne me faites pas plus longtemps l’affront d’entacher ma réputation de collectionneuse d’œuvres d’art, acquise à la sueur de mon… front, tout au long de ces dernières années. Réputation que, vous le comprendrez aisément, je tiens à garder intacte.
Quelle insolence!
Il est vrai que j'ai été dotée de moults qualités plus délicieuses les unes que les autres, depuis le jour de ma naissance, oserai-je même dire, bénie des dieux ?
Et ce sont très certainement toutes ces qualités qui vous on fait basculer du côté obscur de la force, et au fond de moi je vous comprends, je succombe moi-même à mon charme chaque fois que je m’écoute parler ou que je me vois dans le miroir.
Cependant, lorsque la fée Carabosse s’est penchée sur mon berceau, lors de mon baptême il y a 28 ans au château de Versailles, elle m’a dotée d’un sacré défaut, et non des moindres :
l’Impatience.
J’en souffre de manière chronique et vous le savez pertinemment.
Comment avez-vous pu croire que je pusse résister aussi longtemps à votre charme et que je pusse me faire subir cette torture de ne pas vous sauter au cou, pour ne pas dire à la q....., chaque fois que je vous voyais?
A quel moment avez-vous vu dans mon regard du désir ou de l’amour?
Lorsque j'ai envie de quelque chose, sachez que je me sers, et ce, sans attendre, et ayant par chance été dotée de la parole, je sais aussi exprimer très clairement mes désirs ou sentiments, lorsque j’en ai.
La seule partie de votre corps que vous pourriez rêver de voir être touchée par moi, est votre joue frémissante sous le claquement puissant de ma main manucurée à la perfection avec le vernis rouge N° 528 de Chanel.
Mais ma plume a toujours été la meilleure des gifles... même s'il est vrai que j’aime bien gifler aussi.
Songez donc la prochaine fois à faire signer un contrat clair et sans ambiguïté exprimant la liste complète de vos attentes à vos " amies " afin d’éviter ce genre de situation confuse et bien malheureuse.
Fort heureusement toute cette histoire ne restera pas dans mes annales, mais très certainement dans les vôtres.
En vous souhaitant la vie que vous méritez, veuillez ne pas recevoir, Monsieur, l’expression de mes salutations les plus sincères.
Ps : si d’autres de mes amis masculins se trouvaient dans ce même genre de disposition émotionnelle ou chimique vis à vis de moi, je vous saurai gré de m’en informer dans les plus brefs délais via pigeon voyageur recommandé avec fiente de réception, afin que je puisse vous reformuler avec précision les modalités de nos contrats d’amitié, et, en cas de négociation ou non-acceptation de votre part, lesdits contrats seront déclarés nuls et non-avenus.
EN BREF, MERCI DE NE PAS ME CASSER LES OVAIRES AVEC VOS POUSSEES DE TESTOSTERONE.
Nadia Chibani
#metoo
Copyright Nadia Chibani – samedi 21 avril 2018.
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