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Notes d'auteur :

Bonjour !

Merci à BellaCarlisle pour sa review qui m'a faite énormément plaisir (j'y réponds prochainement) ! Ce quatrième chapitre s'oriente vers le marché que Gersan et Morgane s'apprête à passer. Vous saurez aussi pourquoi elle a choisi ce bandit de grand chemin et pas un autre.

Quelques infos :

  • A l'époque du Moyen-âge, la croyance concernant les Loups-Garous était particulièrement répandue tout comme celle concernant les sorcières.
  • De bon aloi signifie "de bonne qualité".
  • Ost signifie "l'armée du roi".
  • Fratrouiller signifie "Bavarder"
  • Sans vous conchier signifie "Sans vous outrager".
  • Une escarcelle était une grande bourse que l'on suspendait à la ceinture.
  • Pour le reste, je vous invite à cliquer sur le lien de vocabulaire dans le chapitre précédent.

Bonne lecture !

Lyssa.

 

Morgane plissa les yeux et désigna la bougresse d’un geste de la main. A ses yeux, Isalt ne valait pas mieux que les rats grouillant dans la cave à vins.

- Qu’elle écoute nos manigances, elle ne sera bientôt plus de ce monde pour les conter.

- Venons en au fait, Dame Morgane ! répliqua Gersan sans même tourner la tête vers la matrone qui éclata en longs et bruyants sanglots. Vous fatrouillez du roi Arthur par tans et j’imagine qu’il est l’objet de votre visite ici. Sans vous conchier, qu’est-ce qui vous fait penser que je vais accepter et gerroyer pour vos beaux yeux ? J’ai plus de chances d’être estriller par l’ost ou d’être bouter aux oubliettes que de pourfendre le roi de mon coutelas, dit-il en prenant une gorgée de bière. Vous avez des charmements et des sortilèges qui me laissent pantois mais, quitte à mortir, autant ne pas me salir.

Gersan reposa vivement sa chopine sur le comptoir. L’homme n’avait que peu d’éducation et ne savait ni lire ni écrire mais il n’était pas pour autant naïf comme la donzelle semblait le penser. S’il n’en retirait pas quelques bénéfices telles que des espèces sonnantes et trébuchantes, il n’avait aucun intérêt à la suivre dans cette quête vengeresse dusse-t-elle le faire périr dans d’atroces souffrances. Morgane avait écouté le maraud, ses traits ne reflétant pas la moindre expression. Lorsqu’elle reprit la parole, sa voix était douce, presque tendre.

- Je connais les hommes de votre espèce, Gersan. Ne me prenez pas pour une sotte, je vous prie. Si je suis venue à vous, je ne me leurrais pas sur les tenants du marché que nous allions passer. Je peux vous promettre ce que vous avez toujours désiré. Je peux vous offrir l’or, les terres, le pouvoir… Demandez et vous obtiendrez… une fois que le roi Arthur aura trépassé.

Les lèvres de la crapule se retroussèrent dans un sourire amer.

- Qui me dit que je peux vous faire confiance ? Voyez cette cicatrice, dit-il en désignant abruptement celle qui lui barrait l’oeil droit. Elle m’a été faite par l’un de mes anciens complices lors d’une nuit sans lune. J’avais convoyé des années durant avec cette chiabrena ! s’emporta-t-il en renversant d’un mouvement de son membru le liquide ambré. Il n’a pas hésité un seul instant à me déconfier, emportant la cagnotte que nous avions rapiné ensemble. Vous comprendrez aisément que, depuis ce jour, ma seule compagnie me suffit amplement. Si vous désirez passer affaire avec ma personne, il vous faudra plus que des promesses, sorceresse…

La peur qu’il avait ressenti au début de leur entrevue n’avait plus lieu d’être. Il n’était pas un couard et il préférait mourir que de ployer le genou devant une femme, fusse-t-elle une enchanteresse. Si elle n’avait rien à lui offrir prestement en contrepartie de son allégeance, il ne passerait pas la porte de la taverne. Il vit les yeux de Morgane luire de cette même lueur rouge qu’il avait pu observer tantôt. Gersan ne baissa pas le regard, prêt à endurer mille souffrances s’il pouvait garder sa fierté.

- Ne jouons pas plus que nécessaire, mon ami, susurra-t-elle suavement. Qu'est-ce qui pourrait vous satisfaire ?

- Des sacs remplis de pièces d’or de bon aloi, ma Dame, répondit-il en croisant les bras, un sourire vicieux éclairant ses lèvres gercées et découvrant des dents noires mal entretenues. Je ne parle pas d’escarcelle, entendons-nous bien, mais de sacs en toile comme en utilisent nos bons meuniers…

- Cela sera fait, acquiesça Morgane en se reculant de quelques pas.

Sortant ses mains de sous sa longue cape, la sorcière les croisa et, dans un souffle inaudible, murmura différentes incantations. Derrière le comptoir, Isalt se tenait au tonnelet pour ne pas flancher. En un rien de temps, une vingtaine de sacs, tous emplis à ras bords, apparurent sur le parquet en bois de l’auberge.

- Êtes-vous prêt à m’écouter à présent ?

- Je vous suivrais au bout du monde si vous me le demandiez, Dame Morgane ! déclara-t-il en se laissant tomber du tabouret pour tâter son or.

Dans un rictus sardonique, l’homme la salua d’une révérence. Morgane, apaisée, se tourna vers la matrone qui, sursautant vivement, fut incapable de soutenir les prunelles émeraude de la damoiselle.

- Du bon vin pour fêter notre accommodement, ordonna l’enchanteresse.

La ribaude s’exécuta, bien contente de devoir descendre au sous-sol pour récupérer la vinasse gouleyante demandée. Au moins s’éloignait-elle pour quelques temps des deux personnes les plus malveillantes qu’elle eut connu au cours de son insignifiante existence. Une fois que la lourde porte se fut refermée sur celle-ci, Morgane affronta son nouvel allié du regard.

- Arthur a pour coutume de partir à la chasse les soirs de pleine lune, lui apprit-elle. Savez-vous ce qu’il aimerait transpercer de sa lame, Gersan ?

- Les loups-garous. Ils sont recherchés depuis des décennies sans qu’aucun des rois l’ayant précédé n’aient pu mettre la main dessus, Votre Altesse.

- Savez-vous pourquoi ?

- Les hommes sont de piètres chasseurs, répondit-il, les iris de ses yeux ne devenant plus que des fentes. Leur criement peuvent s’odir à des kilomètres à la ronde et leurs traces sont immenses. Quant à leur odeur, elle est si forte que je pourrais la fleurer avant même qu’il ne mette un pied dans la forêt…

Un petit rire passa les lèvres de Morgane. Un rire vil, cruel, bientôt rejoint par celui, rauque et saccadée, de Gersan. Un aboiement de chien. Un hurlement de loup.

Note de fin de chapitre:

Vous attendiez-vous à ce que notre bon ami Gersan soit un loup-garou ? Morgane le glisse dans l'une des phrases lorsqu'elle le rencontre ("Je sais de source sûre que vous êtes le bisclavret du coin..."). 

Si le coeur vous en dit, n'hésitez pas à me faire vos remarques sur ce texte.

 

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