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Notes d'auteur :

Bonjour ! Voici donc le premier chapitre de cette fiction qui a découlé légèrement plus facilement que le prologue (le temps de se mettre dedans sans doute).

Comme je l'ai dit, le voabulaire est celui de l'époque, je vous mets donc le lien du site que j'ai utilisé et qui vous permettra de mieux comprendre (je pense) le texte.

lien vocabulaire : http://defenseurs.forumactif.org/t309-vocabulaire-medieval

N'hésitez pas à me donner votre avis. ;)

A très bientôt pour la suite !

Lyssa.

Ce jour, par une matinée venteuse et pluvieuse, Gersan entra dans la taverne d’une démarche lourde. Son entrée, comme à chaque fois, fit grand bruit dans la taverne. Les rires et les quolibets s’interrompirent, laissant place à un silence pesant. La matrone, dans un petit glapissement de surprise, retroussa ses jupes sales et se dépêcha de rejoindre le comptoir pour lui remplir une chopine. 

- ‘Jour, Gersan ! susurra-t-elle en découvrant une rangée de dents noircies et jaunies par le temps.

Isalt était le nom de la ribaude mais il y avait bien longtemps qu’on ne l’appelait plus ainsi, préférant lui faire signe du doigt ou claquer la langue pour qu’elle accoure sans tarder. Fallait bien avouer qu’elle n’avait pas grande importance sinon de fournir la pitance.

Gersan lui répondit par un grognement et porta le liquide à ses lèvres gercées. Il l’engloutit aussi sec en deux ou trois gorgées avant de tendre le verre vers elle pour qu’elle lui en serve un autre.

- Comment vas ? s’enquit-elle en se penchant un peu plus pour qu’il puisse reluquer.
- Fort bien, marmonna-t-il sans en dire plus.
- Un brouet et une poularde ? demanda-t-elle avec un clin d’oeil aguicheur.
- Un brouet, répondit-il en sortant deux pièces en bronze et les laissant rouler sur le comptoir.

Si Isalt s’étonna du manque d’appétit de la crapule, elle n’en dit rien et se contenta de lui remplir un bol de légumes où flottait quelques restes de la veille. A vrai dire, elle avait hâte de lui fausser compagnie et de retrouver les joyeux lurons qui brayaient des chansons paillardes dans le fond de la pièce en cognant leurs verres sur les tables en bois. La matrone ne l’aurait jamais dit à personne, n’ayant pas l’envie de passer pour une couarde, mais Gersan lui fichait la frousse et elle priait à chaque fois pour qu’il déguerpisse au plus vite.

Gersan engloutit le bouillon aussi rapidement qu’il l’avait fait pour sa chopine et s’essuya la bouche d’un revers de la main. Les affaires n’étaient pas bonnes ces temps-ci et les riches marchands ne couraient pas les rues, encore moins les buissonades dans lesquels il sévissait. Son humeur s’en ressentait et il mourait d’envie d’étriper l’un de ces manants qui traînaient dans ce bouge.

Pourtant, il n’en eut pas le temps puisque la porte de la taverne claqua et qu’un silence, aussi tonitruant que le premier, sinon plus, se fit odir dans l’auberge. Sitôt après, ce fut des messes basses et Isalt faillit tomber à la renverse en se levant des genoux du gueux où elle était assise depuis quelques minutes.

Gersan n’était pas homme à prêter foi aux rumeurs et aux murmures mais il tenait à sa condition, sa réputation, et si un autre s’était octroyé le droit de faire valoir sa trogne par ici, il allait le renvoyer d’où il venait. Aussi fut-il plus qu’étonné de découvrir une femme quand celle-ci, le visage d’abord camouflé par une épaisse capuche noire, la fit glisser sur ses épaules. Tous retinrent leur souffle alors que les traits fins de la damoiselle s’ornaient d’un sourire. Il aurait été la rabaisser que de dire qu’elle était belle ; pire, cela aurait été mentir.

Sous de longs cils noirs se cachaient deux prunelles émeraudes, de celles qui vous tiennent et vous retiennent jusqu’à votre dernier souffle ; Créature de l’ivresse, enchanteresse ! Ses cheveux, cendrés de braises éteintes, se mouvaient dans son dos à la manière de fils de soie brûlés, de cordes qui s’enroulent et se déroulent autour de vos poignets. Sorcière, ensorceleuse, voilà le genre de femme qu’elle était.

Gersan fronça les sourcils. Si la plupart des hommes qu’il côtoyait seraient tombés en pâmoison à ses pieds, il n’en était rien le concernant. Il le fleurait, elle n’était pas ce qu’elle semblait et son sourire, envoûteur, n’en était que plus retors. Le regard de la charmeuse parcourut la salle et elle fit quelques pas avant de s’arrêter derrière lui, dardant ses yeux de serpent sur l’accoutrement du bandit.

- Vous êtes celui que je cherche, dit-elle dans un chuchotement où il entendit distinctement chaque mot. J’ai attendu des années avant de venir vous trouver.
- Vos balivernes peuvent attendre que j’ai fini de mangeailler, rétorqua-t-il pour récupérer sa louche qu’il frappa deux fois sur son bol pour appeler son hôte.

L’inconnue était sans conteste d’une belle lignée, Gersan en aurait mis sa main à couper. Grand bien lui fasse, il ne comptait pas s’aplatir pour autant devant son ascendance de nobliaux. Lui venait d’une famille de paysans de la côte est et ses manières de rustre lui convenaient très bien.

Un rictus déchira les lèvres de la femme alors qu’elle posait une main sur son épaule. Gersan s’immobilisa. La force de la damoiselle était telle qu’il était incapable de s’en défaire et la colère le fit trembler.

- Qu’est-ce que vous voulez ? s’enquit-il d’une voix doucereuse, menaçante.
- Je ne vous demande rien d’autre que de m’écouter, répondit-elle d’un ton mélodieux bien que dangereux. Je sais, de source sûre, que vous êtes le bisclavret du coin, mon ami. Tous vous respecte, vous craigne. Vous avez pourfendu nombre de canailles sur ces terres si je ne me lobe pas.
- De part chez nous, les donzelles ne vont pas à la brune sans escorte, bailla-t-il, son visage s’éclairant d’une lueur mauvaise, sa cicatrice s’élargissant et prenant une couleur pourpre.

La taverne s’était brusquement couverte d’une atmosphère sombre, plus sombre encore que d'ordinaire. Les ombres paraissaient entamer une danse lente autour d’eux mais ni l’un ni l’autre ne baissa les yeux.

Ce fut à ce moment-là que la sorceresse dévoila ses mains, les sortant de sous sa cape, et qu’une lueur couleur de jade brilla, révélant les charmements dont elle était maîtresse. L’homme retint un frisson mais ne put cacher un mouvement de recul. L’inconnue se pencha doucement vers lui et un éclat rougeoyant traversa ses prunelles.

- Je suis Morgane, fille d’Ygerne et du roi de Cornouaille, Magicienne du temps et des hommes, Déesse de la Terre et Enchanteresse aux mille pouvoirs de guérison.

C’était bien la première fois qu’un être comme Gersan se voyait délester de toutes ses forces. Pour autant, le bandit n’en perdit aucunement sa morgue habituelle.

- Je suis Gersan, géniture de merdaille et houlier de grand chemin, tristeusement célèbre pour rapiner et estriller les baronnets violentement. Que me vaut l’honneur de votre présence, Damoiselle ?

Étrangement, la pression qu’il ressentait comme si le poids de centaines de mânes s’étaient abattues sur son dos se relâcha. La fée Morgane se redressa, se réjouissant du lien qu’elle venait de créer avec le pillard.

Note de fin de chapitre:

La référence au sous-genre Moyen-âge se trouve dans le nom de la patronne de l'auberge, Isalt, dont j'ai changé deux lettres en une et dont la consonnance se rapproche de Iseult (Tristan et Iseult de Joseph Bédier). Ce personnage est d'ailleurs tout le contraire d'Iseult ! ^^

 

 

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