Son visage était lunaire.
Drôle d’expression. Qu’est-ce que la lune pouvait bien avoir à faire avec cette fille insipide ?
Ce n’était pas une remarque positive, non. Son corps était banal, sans disgrâce particulière mais sans élégance non plus. Son visage lui, n’était pas vraiment beau.
Circularité parfaite, incroyable platitude et épiderme laiteux, sur sa peau se dessinaient des cratères laissés par l’ingratitude de son adolescence. Au milieu de ses joues planes, deux grandes billes bleues aqueuses mangées par de petits cils trop blonds. Au-dessus, l’ombre vague de ce qui aurait dû être une paire de sourcils laissait la place à un front interminable.
Un nez épaté et luisant qui peinait à séparer les deux immenses pommettes, surmontait une bouche aux lèvres trop fines et à la couleur transparente.
Le tout était encadré d’une auréole vaporeuse de cheveux d’un blond terne.
Son visage n’était pas vraiment beau mais il n’était pas disgracieux pour autant. Il était banal après tout, et la parait d’une invisible insignifiance.
Son visage était lunaire, drôle d’expression. Drôle surtout, comme elle était adéquate.
Son visage était comme la lune, lisse, rond, blanc, et mangé par les cratères.
Et quand s’écartaient les nuées, il se révélait d’un étrange sourire qui illuminait les alentours.
Ses dents étaient de guingois, mais personne ne le remarquait.
Ses yeux ne cessaient pas d’être aqueux, mais l’émotion les rendait lumineux.
Ses joues, elles, cessaient d’être planes, et formaient enfin la courbe d’une pommette charnue et vive. La rougeur de la joie faisait disparaître les cratères.
La blancheur, elle, devenait lumière.
On doutait alors que quiconque eût pu un jour la trouver laide.
Elle devenait lumière.