Summary: 
Calendrier de l'avent 2018
Nouvelles :
1. Speed Demon
2. Vinland
3.Silencieusement, dans la nuit...
4. Le Postier
Categories: Aventure Characters: Aucun
Avertissement: Discrimination (racisme, sexisme, homophobie, xénophobie), Violence physique, Violence psychologique
Langue: Français
Genre Narratif: Nouvelle, Roman
Challenges: Series: Calendrier de l'Avent du Héron 2018
Chapters: 11
Completed: Non
Word count: 13467
Read: 39755
Published: 15/11/2018
Updated: 11/12/2018
Story Notes:
Hey ! :D
Petit changement prévu pour cette année. Il y aura bien des nouvelles comme l'édition précédente mais considérablement moins que l'an dernier. Puisque j'ai prévu d'y intégrer une petite histoire d'une bonne dizaine de chapitres, qui je l'espère vous plaira.
( Pour les curieux, l'image de couverture est quand même un très gros indice sur le sujet de cette histoire :D )
1. 1er décembre : Speed Demon by Berserkr
2. 2 décembre : Vinland by Berserkr
3. 3 décembre :Silencieusement, dans la nuit... by Berserkr
4. 4 décembre : Le postier by Berserkr
5. 5 décembre : Couronne d'étoiles by Berserkr
6. 6 décembre : Palais Mécanique by Berserkr
7. 7 décembre : Le Sphinx by Berserkr
8. 8 décembre : Le Petit Faucheur Magazine by Berserkr
9. 9 décembre : Fieber by Berserkr
10. 10 décembre - Sonnet pour vagabonds by Berserkr
11. 11 Décembre - 1/ Des Chrysanthèmes pour John Silver by Berserkr
1er décembre : Speed Demon by Berserkr
Author's Notes:
On commence par les nouvelles donc :D Celle-ci a pour thème "guitare" et est relativement courte. Je voulais écrire sur le sujet depuis un moment et ça tombait très bien :)
La femme de chambre arriva devant la porte de la chambre d’hotel. Les clients s’étaient plaints d’un étrange bruit, comme un coup de feu. Comme le disait le maître d’hôtel un peu plus tôt, on pouvait s’attendre à tout et son contraire avec ces groupes de heavy metal. Elle toqua une première fois. Puis une deuxième. Ne recevant aucune réponse, elle utilisa son passe et pénétra dans la chambre.
- Mr Goodman ?
Pas de trace du client et la pièce était plongée dans le noir. Ce n’était pas qu’un simple cliché, ce musicien avait laissé l’endroit dans un état lamentable. Des bouteilles d’alcools divers et variés étaient éparpillées partout dans la chambre. Les cendriers débordaient de mégots de cigarettes et de joints.
Il y avait un cadavre sur le lit. Celui du client. Et une feuille de papier sur le lit. Quelqu’un, sans doute le client, avait écrit dessus. La femme de chambre, sans faire davantage attention au mort, prit la lettre et la lut.
Ce soir était le clou du spectacle. Le 20 mai 2005 marque la fin de Frank Goodman. Maintenant j’en suis certain. Mon talent de guitariste s’est envolé comme l’étrange beauté me l’avait prédit. Oubliez les cornes, la queue et le teint écarlate. Le diable est une pute rousse en robe noire, qui n’en demeure pas moins redoutable.
Car oui, ce n’est pas que le titre de l’un des meilleurs morceaux des grands Speed Demon, mon groupe, ce qui a changé ma vie. J’ai mis un pied en enfer depuis longtemps. Et je l’ai compris bien trop tard. Mais je ne voulais que la gloire. J’ai bel et bien passé un pacte avec Satan.
Oui en lisant cette lettre de suicide, parce c’est bel et bien de mon suicide qu’il s’agit, vous me prendrez sans doute pour un type complètement fou. Vous n’avez probablement pas totalement tort. Le bluesman Robert Johnson aussi est passé pour un taré, avec son histoire de pacte avec Satan, j’imagine. Seulement son contrat devait être sacrément pourri, pour caner à vingt-sept ans. Personnellement, j’ai passé les vingt-sept ans, il y a longtemps déjà.
Mais je me dois de tout raconter.
j’avais vingt ans, c’était les années 80 . Les années Reagan pour la faire courte. La décennie où le metal était devenu vraiment intéressant et aussi diversifié qu’il ne l’est aujourd’hui. Et lucratif, surtout.
Mais pas vraiment pour moi, on va dire. Pas à ce moment du moins.
Je n’avais pas de travail stable, le groupe que j’avais créé avec mes potes de la fac ne marchait pas. Et ma copine était enceinte, mais Lucy s’était barrée trois mois plus tôt avec un péquenaud fan de country et des Allman Brothers du nom de Cassidy. On s’était battu lui et moi. Je lui avais pété la mâchoire avec une queue de billard pour la peine, mais ça n’avait pas soulagé ma douleur pour autant. Bon ça m’avait aussi valu quelques ennuis avec la justice.
Mais bon, je m’inquiétais surtout de mon piètre talent pour la guitare, à ce moment-là. Les autres aussi jouaient comme des pieds, mais je ne pouvais pas leur en vouloir. Ce groupe était juste un passe-temps pour eux.
Un soir, alors que je rentrais du bar, je suis tombé sur une magnifique jeune femme. Elle semblait perdue. Je me suis directement dit que toute tentative de drague était vouée à l’échec, je crois. Elle était beaucoup trop belle pour moi. Je dois qu’avec mon acné encore présente, ma petite moustache ridicule et mes cheveux longs, je n’étais pas dans la meilleure période de ma vie.
Pourtant elle est venue vers moi, et j’ai fini sans trop savoir comment dans un autre bar, alors que j’étais déjà en train de macérer dans mon jus, depuis un moment. On a discuté longtemps avant de rentrer chez moi, dans ma ridicule chambre d’étudiant. J’avais déjà signé le contrat au bar, je crois. Mais j’étais tellement fait, que je ne m’en souvenais déjà plus. On a fait l’amour. Longtemps. Pour réellement conclure le pacte, maintenant que j’y repense. Enfin j’imagine que c’est ça.
Le lendemain, elle avait disparu. Elle n’avait laissé qu’un parchemin sur mon bureau. Fait en peau humaine, à ma grande surprise. J’ai vraiment cru halluciné sur le coup, mais les faits étaient ce qu’ils étaient. J’avais bel et bien passé un contrat avec Satan, lui-même. Ou elle-même, plutôt.
Les résultats ne se sont pas fait attendre bien longtemps. Les notes défilaient dans ma tête à toute vitesse. Un simple solo, ma Némésis d’avant le contrat, était d’une facilité déconcertante à jouer. Alors j’ai quitté les gros nazes et j’ai passé des auditions pour intégrer Speed Demon. La suite vous la connaissez. On est le groupe le plus important de ces dernières années et j’en ai vu du pays. Je me suis marié aussi. Une belle erreur qui n’a duré que un an et m’a coûté la moitié de ma fortune pas exceptionnelle mais tout de même conséquente.
Je savais que le contrat avait une fin, évidemment. Alors j’en ai profité à fond de ces années. Mais ces dernière semaines, j’ai compris que c’était fini. Mes doigts sont devenus de plus en plus imprécis, jusqu’à ce soir avec ce concert catastrophique. Alors je pense qu’il est temps de s’arrêter là, sans regrets ni chagrin.
P.S : Pardon pour tout le bordel.
La femme de chambre termina la lecture avec le sourire. Elle écrasa la lettre dans sa main. Celle-ci fut soudain entourée de flammes, qui se reflétait dans les yeux de reptile de la jeune femme. Le pitoyable témoignage réduit en cendres, elle s’adressa ensuite au cadavre.
- Tu aurais au moins pu attendre que je vienne te voir. Enfin… à tout de suite, mon chou !
End Notes:
Quelques petites infos amusantes ( enfin façon de parler :D) : Robert Johnson existait bel et bien, et le type avait bien laissé propagé la rumeur comme il avait conclu un pacte avec Satan. Du coup c'est de là qu'est partie mon idée.
Sinon pour le post-scriptum de Frank : il s'agit d'un message que le chanteur d'un groupe de black metal assez connu a laissé avant de se faire sauter la cervelle.
2 décembre : Vinland by Berserkr
Author's Notes:
Le thème cette fois est Invasion viking. Et j'ai un peu pris le thème à la lettre :D Mais pas trop non plus.
Bonne lecture !
Quand le grand et renommé Eric Leifsen lui avait proposé de partir en sa compagnie, afin de découvrir de nouvelles terres où s’installer et prospérer, Narvi Dent-de-serpent n’avait pas hésité un seul instant. C’était son ami depuis des années après tout. Avec son knorr et avec sa dizaine d’hommes, il faisait pâle figure comparé à d’autres équipages, pourtant les hommes de Narvi étaient les plus valeureux des combattants et marins que comptait ce monde. On les redoutait sur nombre de mers.
Sigurd était son second. Il était jeune et un peu inconscient par moments, mais en grandissant il était assuré d’avoir à la même renommée que son oncle, ce dernier en était persuadé.
Leur première étape vers l’inconnu en partant de l’Islande fut une immense côte gelée. Ceci dit après quelques temps d’exploration, il s’avéra que cette nouvelle contrée disposait de suffisamment de terres et d’étendues d’herbe pour être habitable. Leifsen la nomma Pays Vert avec l’aval de tous ses camarades. Les premiers contacts avec les locaux se passèrent à merveille. Ces derniers avaient la peau mate et d’étranges yeux, mais ils se montrèrent plus accueillant que la plupart des peuples que les hommes du Nord avaient pu rencontrer au fil des siècles. Peut-être parce qu’ils ne tenaient absolument pas à leur imposer un unique Dieu ridicule, avait un soir supposé Narvi, hilare et légèrement ivre. Ses hommes l’avaient suivi dans son éclat de rire.
Les autochtones leur avaient indiqué la présence de terres encore plus étendues par-delà l’océan. Eric avait décidé de les explorer, sitôt l’hiver passée.
Les étrangers ne les avaient pas trompé et après quelques semaines de navigation, les colons de Leifsen posèrent le pied sur une nouvelle terre. Ils avaient quelque peu dévié de leur cap initial suite à une tempête mais c’était pour le mieux. Cet endroit était clairement fertile. De la vigne sauvage y poussait. Ainsi Leifsen la nomma Vinland.
La colonie prospéra un temps. Toutefois la maladie commença à s’installer. La violence aussi, et il fut important d’établir rapidement une société durable. Par chance les natifs du coin étaient du genre belliqueux. Suffisamment pour rassembler la colonie en une seule et même horde prête à déferler sur eux. Ils finirent par forcer les sauvages à l’exil, après quelques massacres. Mais ce n’était pas suffisant pour Leifsen, qui voulait découvrir toujours plus de terres.
Encore une fois, Narvi se porta volontaire. Avec son équipage de douze hommes, il servirait d’éclaireur en arpentant la rivière qui s’enfonçait manifestement très loin dans les terres.
Eric Leifsen ne revit jamais son plus fidèle ami.
La reconnaissance se passa à merveille dans un premier temps, seul quelques escarmouches avec les sauvages ternirent leur voyage et ils durent enterrer l’un des leurs. De treize, ils passèrent à douze.
Le temps, puis la promiscuité entraînèrent la maladie et ils durent s’arrêter sur une crique. Mais ils avaient perdu quatre des leurs, avant de prendre une décision. De douze, ils passèrent à huit.
Ils décidèrent de rester quelques jours sur cette crique, leurs compagnons décédés ayant sérieusement entamé leur morale. Et puis il leur fallait pêcher et chasser, le besoin de provision se faisant sentir.
Une nuit, ils tombèrent par hasard sur un campement de ces sauvages. Ils les tuèrent presque tous dans leur sommeil, hormis les femmes, qu’ils violèrent sans ménagement pour passer le temps. Cependant au matin, celles qui étaient encore en vie avaient disparues du campement des guerriers. Holgarr, un homme très massif accusa Sigurd de les avoir aider à fuir. Après tout le jeune second avait refusé de leur faire le moindre mal. Celui-ci clama qu’il les avait en effet libéré et qu’elles avaient assez souffert comme ça. Bien que déçus, ses hommes acceptèrent l’initiative. Hormis Holgarr qui s’emporta.
- Voilà qui me ne surprend guère venant de toi, fils de chienne. Oui, mes amis, j’estime que vous devez savoir. Ce petit coq est tombé amoureux d’une esclave de son père. Celui-ci refusant de la libérer, notre second a poignardé le vieil homme dans un accès de rage. Il a survécu évidemment, et il l’a exilé. Non sans auparavant, découper les seins de la fille devant les yeux de ce …
Holgarr ne put jamais finir sa tirade. Sigurd le transperça d’une lance avant de s’acharner sur lui à coups de hache. Narvi était évidemment au courant du passé de Sigurd mais il faisait confiance et estima que la mort de Holgarr était une juste punition pour sa gouaille un peu trop forte.
Il n’en resta que sept.
Au quatrième jour, Narvi estima qu’il fut temps de repartir. Cependant une brume terrible les empêcha de suivre la rivière. Les hommes commencèrent à croire que le père du loup leur jouait l’une des ses nombreuses ruses dans le but de les rendre fous. Certains estimèrent qu’il fallait faire un sacrifice. Un sacrifice humain.
Esprit purement logique, Narvi refusa, au grand regret de ses hommes. Pourtant comme ses guerriers, il avait ressenti les énergies mystiques qui se dégageaient de cette crique. Des énergies des plus négatives, le mal à l’état pur.
Alors, contre son gré, leur capitaine fit office de sacrifice. Horrifié par ce qu’il s’était passé, Sigurd prit la fuite dans la forêt. Avec la nette intention de venger Narvi de la folie qui avait envahi le coeur de l’équipage.
Il n’eut cependant pas à le faire.
Au matin, les hommes étaient tous morts, dévorés vivants. Sigurd n’avait pas pu dormir à cause de leurs cris. Durant la nuit, il avait aperçu une silhouette massive se déplacer lourdement entre les arbres. La créature faisait bien la taille d’un ours brun et se déplaçait sur ses deux pattes arrières, comme un homme le ferait. Et surtout elle disposait de bois de cerfs. Sigurd crut qu’il allait se faire dévorer à son tour mais la bête ne le remarqua même pas.
Observant avec horreur les restes de son équipage, il observa le bateau heureusement épargné. Sa terreur augmenta d’un cran quand il comprit que leur capitaine n’avait pas été dévoré par la créature, mais par leur propres compagnons, pris de folie. Sans nul doute, la bête était un messager des Ases pour les punir de leurs actes.
Il ne pouvait pas remonter le courant puissant et revenir vers Vinland. Aller de l’avant fut son seul choix. Il prépara malgré tout un bûcher pour ses camarades tombés.
Les maigres provisions restantes sur son embarcation, Sigurd s’enfonça dans les terres, vers un endroit qu’il espérait plus accueillant.
3 décembre :Silencieusement, dans la nuit... by Berserkr
Author's Notes:
Bon celui-ci est plus long que les deux premiers textes, mais vous commencez à me connaître hein :D
Ce texte a été écrit avec le thème " Sang Chaud "
Bonne lecture !
Léo passa la porte de la maison de sa cousine, un peu éreinté par sa journée. Julia avait immédiatement accepté de le loger quand il était sorti de prison. C’était bien l’une des seules de sa famille proche à s’être manifestée, d’ailleurs. Il y avait bien une autre personne, mais impossible de vivre avec lui pour des raisons évidentes. Cela faisait six mois que Léo n’était plus sous contrôle judiciaire, ce qui lui facilitait grandement la vie. Il avait miraculeusement retrouvé du travail, en tant que chauffeur pour un homme d’affaires. Son casier n’avait pas gêné son patron. Ou plutôt ce dernier lui avait donné sa chance. Chance que Léo avait saisi à pleines mains. Il cherchait maintenant un logement après quasiment un an et demi de cohabitation avec Julia.
Cette dernière était en train de regarder tranquillement la télé. Léo lui fit la bise, et prit place à coté d’elle. C’était facile de vivre avec sa cousine. Elle n’avait pas beaucoup d’amis, encore moins de petit-ami. Si bien que Léo n’avait pas l’impression de gêner. De toute façon, Julia assurait qu’il ne la dérangeait pas.
- Toi, t’as la flemme de faire à bouffer, vu comment t’es avachie dans le canapé, devina Léo amusé.
- Ah mais totalement.
- Pizza ?
- Pizza. Ça donne quoi pour la recherche d’appart’ ?
- J’ai un rendez-vous, mercredi matin. J’espère que ce sera bon, cette fois.
- C’est drôle, t’es pas trop matérialiste comme type, mais t’as un mal fou à à te décider.
- J’y peux rien si le type est déterminé à me refiler des taudis.
- Ouais bah si c’est comme ça, change d’agence.
La sonnette retentit soudainement. Julia se leva, légèrement surprise. Ils n’attendaient personne et il était déjà tard.
- Je m’en occupe, toi commande les pizzas.
- Bien, madame. Comme d’hab ?
- Ouaip.
La commande passée, Léo retourna dans le salon. Celui-ci était un peu plus rempli. Un garçon d’environ sept ans avançait timidement dans la pièce. Son petit frère, à la démarche encore maladroite, le collait de près. Julia discutait avec leur mère, une grande femme métisse que Léo avait déjà aperçu une ou deux fois.
- T’as déjà dû rencontrer Marlène, Léo. Et ça, c’est Matthieu et Paul. La petite famille, ça c’est mon cousin Léo.
- On s’est croisé une ou deux fois dans la rue, peut-être, se rappela Léo.
- La baby-sitter m’a lâchée, et je dois quand même partir travailler. J’espère que ça ne vous dérange pas.
- J’aurais peut-être dû commander plus de pizzas, plaisanta-t-il.
- Oh non, ne vous en faîtes pas, ils ont mangé, assura Marlène, en ricanant. Ça ne te dérange vraiment pas, au moins ? demanda-t-elle à Julia.
- Maais non. En plus, ce sont des amours.
- Super. Je dois vraiment y aller. Je serais de retour vers une heure du matin.
- Pas de soucis, on garde les gobelins. Le couché vers 20h30, ça ira ? On va passer un peu de temps avec eux quand même.
- Ça me va. Allez j’y vais. Bisous les garçons, et soyez sages.
Une fois les enfants couchés dans le lit de Julia, ce qui ne fut pas aussi simple que prévu, les cousins purent enfin manger tranquillement. Léo était un peu intrigué par cette femme.
- Elle habite la rue depuis combien de temps ? Je l’avais déjà vu dans le coin, mais je la croise peut-être une fois par semaine.
- Deux mois je dirais. Et elle est infirmière, donc elle a des horaires assez variables.
- J’imagine, ouais. En tout cas, je maintiens mon souhait de ne jamais avoir de mômes.
- Faudrait déjà que t’arrête d’être un ours avec tout le monde, et te trouver une nana pour ça.
- Très drôle. Mais reconnais qu’ils sont terribles.
-Agités peut-être, mais je connais des gosses bien pires que ça, à l’école, répliqua sa cousine qui était institutrice. Et entre nous, cousin, je crois que tu lui as tapé dans l’oeil, ajouta Julia avec un sourire.
- Ça, j’en doute.
De son coté, Léo devait cependant reconnaître que c’était une très belle femme.
Marlène fit de nouveau appel à Julia le lundi soir suivant. La baby-sitter l’avait en fait lâchée pour de bon. Mais cette fois la jeune mère avait prévenu Julia en avance. Matthis, l’aîné, demanda à Léo s’ils pouvaient faire une partie sur la console de jeux de Léo.
- Tu pourrais commencer par dire bonsoir déjà, le gronda sa mère.
- Désolé. Bonsoir !
- Irrécupérable, ce gamin, fit Marlène en levant les yeux au ciel. À plus tard.
- Bon courage, Marlène.
Elle sonna toutefois cinq minutes plus tard.
- Je suis en panne de batterie, leur apprit-elle, dépitée.
- Léo, tu l’emmènes ?
Un instant réticent, il se ravisa. C’est son véhicule de travail et il n’avait pas vraiment envie de l’utiliser hors de ses horaires de travail. Mais leur voisine semblait réellement désespérée.
- On remettra la partie à plus tard.
Il mit sa veste et trouva ses clés dans la poche droite.
- C’est parti. Je regarderais demain pour la batterie.
- Super. Merci beaucoup.
Le trajet se passa silencieusement pour commencer, avec seulement de la musique à bas volume. Léo ne mettait pas la radio durant ses heures de travail, par égard pour son patron mais il aimait toujours autant conduire avec du son dans les oreilles. Puis Marlène engagea la conversation. La BMW ronronnait comme toujours.
- Chouette voiture.
- Bah techniquement, elle n’est pas à moi et je suis pas sensé la sortir hors des heures de boulot.
- Je vois. Merci encore.
- De rien, mais n’empêche, à force de vous sauver la mise, ça va vous coûter un repas si ça continue.
- Vous aimez bien emmerder les autres, en fait, constata-t-elle amusée.
- Un peu trop parfois peut-être.
- Mais allons-y pour le repas, dit-elle. Avec votre cousine et les deux petits affreux, bien entendu.
- Ah mais ce n’était pas pour un dîner en tête à tête, la nargua Léo.
- Vous êtes désespérant. Disons... dimanche prochain ?
- Parfait. C’est à droite au rond-point, c’est ça ?
- Oui.
Léo gara la BMW sur une place de parking. Marlène regarda sa montre, et poussa un soupir de soulagement.
- Incroyable, je suis en avance, alors que c’était pas gagné.
- C’est mon boulot d’arriver à l’heure.
- Vantard. Bon je vous laisse. On devrait se tutoyer, sinon.
- Ça me va.
Elle l’embrassa sur la joue et sortit de la voiture. Alors qu’elle commençait à traverser la rue, Léo baissa la vitre.
- Je reste en ville, ce soir. Je te récupère ?
- Avec grand plaisir, cria-t-elle. Une heure du matin.
- Bien, madame !
Bon maintenant il devait trouver une occupation.
- Chouette fille, dit Léo à voix haute, en redémarrant la voiture.
Durant les sept heures qui suivirent, Léo se promena sur les quais, puis dîna dans un fast-food, avant de zoner en centre-ville. Le chauffeur ne s’accordait pas souvent ce genre de moment en solitaire, mais il les aimait particulièrement. Il y avait quelque chose de particulier à déambuler seul dans les rues de plus en plus désertes, au fil des heures. Quand il reprit la voiture pour retourner à l’hôpital, un type sembla vouloir le défier à la course à un feu. Ayant envie de s’amuser, Léo fit semblant d’accepter d’un appel de phare puis le laissa démarrer en trombe tout seul.
Quand il revit le véhicule quelques mètres plus loin, son chauffeur se faisait contrôler par la police.
- Crétin, commenta-t-il.
Léo reprit la même place que lors du premier trajet et attendit. Il était un peu en avance alors il observa les alentours. Tout semblait calme. Il sortit de la voiture pour fumer une cigarette. Mais il ne pouvait s’empêcher de guetter discrètement les deux types qui attendait près de l’entrée principale. Les heures de visites étaient terminées depuis longtemps. Mais surtout ce n‘était clairement pas juste une simple pause clope. Ils semblaient réellement attendre quelqu’un. Ils n’étaient pas angoissés ni stressés. Et surtout ils ressemblaient à nombres de personnes que Léo avait côtoyé dans sa vie passée.
Il reçut un appel de Julia.
- Tout va bien ?
- Ouais, je suis à attendre Marlène.
- Tu vois que le courant passe bien entre vous deux.
- Les fauves dorment ?
- Oh que oui. Et ne change pas de sujet !
Léo observa les deux types devant l’entrée. Une silhouette qu’il commençait à apprécier venait de sortir de l’hôpital et les deux types la suivait.
- Je dois filer.
- Mais ...
Léo raccrocha sans attendre et se dirigea vers Marlène, avant de se raviser et de retourner à la voiture prendre le démonte-pneu dans le coffre. Juste au cas où. Il le cacha dans sa veste, enfila sa capuche et trotta pour les rattraper.
Les types avaient coincé Marlène dans une petite ruelle. Léo écouta d’abord la conversation, la capuche de son sweat toujours sur la tête. L’un d’eux avait un accent de l’est.
- Tu comptes nous rembourser quand ?
- C’était le problème de Karim, pas le mien.
L’un des types, celui en survêtement rouge accueillit la réponse avec un violent coup de poing . Marlène se retrouva à terre, le dos contre un mur de briques. C’était suffisant pour que Léo se décide à agir, il sortit son arme de fortune de sa veste et porta un coup furieux à la cuisse au type à la chemise noire. Ce dernier se retrouva à genoux et Léo le frappa à la tête avec son pied. L’autre voulut l’attaquer mais Léo lui lança son démonte-pneu en pleine face. Il était furieux et engagea ensuite un violent corps à corps avec son adversaire durant lequel il reçut quelques coups. Le type se jeta finalement sur lui, mais Léo passa sa tête sous son bras, et recula pour lui éclater le crâne contre le mur de briques, le laissant assommer.
Légèrement essoufflé, il prit son arme de fortune et mit un nouveau coup à son premier adversaire. Cette fois-ci dans le ventre. Puis il releva Marlène et la fit courir, jusqu’à la voiture. Il démarra la BMW en trombe et quitta l’hôpital le plus vite possible.
Léo conduisit longtemps, encore sous le coup de l’adrénaline et de la rage, il ne faisait pas vraiment attention à sa façon de conduire. Il s’arrêta dans un coin tranquille et souffla un bon coup. Il observa ensuite le visage de Marlène. Le gars n’avait pas frappé très fort, en fin de compte. Un peu de glace pour limiter le gonflement allait suffire, supposait-t-il. De son coté, il avait l’arcade sourcilière bien ouverte et les phalanges sérieusement abîmées.
- Une clope ?
- Je veux bien oui.
- Dehors alors, le boss va gueuler si la voiture sent le tabac.
Il la laissa sortir puis lui donna une cigarette, avant de l’allumer.
- Merci, encore une fois.
- Je me suis méfié d’eux directement, mais je pensais vraiment pas que c’était toi qu’ils cherchaient. Tu m’expliques ?
- Je ne sais pas si tu as besoin de te mêler de tout ça.
- C’est un peu tard, là. Déjà parce que si les flics se mêlent de l’histoire, je suis sans doute bon pour retourner en cabane quelques mois. Et ensuite parce que les types vont vouloir se venger.
- T’as fait de la prison ?
- T’as cru que j’avais appris l’art du combat auprès d’un grand maître de kung-fu ? demanda Léo sarcastique.
- Ce n’est pas le moment de faire de l’esprit.
- C’est vrai, excuse-moi. J’ai pris six ans parce que j’étais chauffeur lors d’un braquage. Mais c’est du passé. Bon pourquoi ils s’en prennent à toi ?
- Mon mari leur avait emprunté de l’argent pour monter une affaire.
- Légale ?
- Oui. Il a emprunté vingt milles euros. Voyant que ça ne marcherait pas, il a rendu l’argent qu’il avait encore sous la main et à commencer à rembourser le reste tranquillement. Sauf qu’entre temps, il s’est tué en voiture, il y a deux ans.
- Je vois.
- Sauf que maintenant c’est foutu d’avance.
- Pour l’instant, on va rentrer et soigner tout ça, mais je t’assure que ce n’est pas une situation insurmontable. J’imagine qu’en tant qu’infirmière, t’as tout ce qu’il faut dans ta trousse de secours.
- Oui, puis avec mes fils, je suis bien obligé. Ils sont du genre casse-cous.
- Merveilleux. Il faut mettre Julia au courant par contre. Elle mettra tes garçons en lieu sûr, le temps que tout soit réglé. Il se fait tard, on devrait rentrer.
Ils rentrèrent chez Marlène et se soignèrent. Julia les rejoignit. Les garçons allaient partir chez l’oncle de Léo, dès leur réveil. Léo resta dormir chez Marlène, une batte de base-ball à portée de main, juste au cas où. Marlène rejoignit son lit, et Léo resta éveillé un moment sur le canapé. Elle redescendit à un moment. Ils discutèrent, apprirent à se mieux connaître, puis Marlène l’embrassa subitement. Ils firent l’amour sur le canapé, puis rejoignirent la chambre de la jeune femme.
- Attends, je viens de comprendre, t’as l’attention de rembourser à ma place ? lança Marlène, la tête posée contre le torse de Léo, ses longs cheveux frisés détachés.
- Ouais, pourquoi ?
- Je sais pas si je peux accepter.
- Bah décide-toi rapidement alors.
- J’imagine que c’est mieux de devoir de l’argent à toi qu’à eux.
- Non non non, tu me dois rien. J’en ai pas besoin de cet argent. Il dort tranquillement chez un ami depuis six piges. Autant qu’il serve à quelque chose d’utile. À vrai dire, ce serait même mieux si je m’en débarrassais totalement.
- C‘est de la folie, Léo. On se connaît à peine. À moins que t’espère autre chose.
- Bah maintenant non pour le coup. Je l’ai déjà eu.
- Ah ah, très drôle.
- On ferait mieux de dormir. Le meilleur moment pour avoir Basile au téléphone, c’est le matin.
- Je n’ai toujours pas accepté ton aide.
- J’ai jamais dit que t’avais le choix, fit remarquer Léo avec un sourire.
------------
La petite citadine de Marlène s’arrêta à l’entrée du camp de gitans.
- T’es sûr qu’il va te le rendre tranquillement cet argent ?
- Mon beau-père a plus d’honneur qu’un samouraï. Il préférerait s’ouvrir le ventre plutôt que de trahir le moindre de ses amis, alors la famille n’en parlons pas. Et puis il m’a élevé après la mort de ma mère, je lui dois pas mal d’emmerdes mais aussi beaucoup de trucs biens.
Léo sortit du véhicule suivit de Marlène. Il appela une bande d’adolescents et il leur donna quelques billets pour qu’il garde la voiture.
- T’es le fils de Pierrot, non ? demanda-t-il à celui qui semblait le plus âgé.
- Ouais. Et je me souviens bien de toi.
- Cool. Je veux pas qu’il manque quoi que ce soit sur et dans sa voiture, sinon ton daron en entendra parler, compris ?
- Bien monsieur.
Ils progressèrent dans le camp lentement, Marlène ayant du mal à marcher sur le terrain abîmé. Léo serra quelques mains au passage. Le mobile-home de Basile était tout au fond, plus imposant que les autres.
- Bas’ ? On est là.
Ils aperçurent la tête d’un homme dégarni d’une soixantaine d’année, au visage marqué.
- Entrez, et enlevez pas vos chaussures, ma belle, dit-il d’une voix grave. Je passerais un coup de serpillière après, de toutes façons
Léo et Marlène marchèrent jusqu’à la cuisine. Basile se leva et pris son beau-fils dans les bras et serra la main de Marlène.
- Vous prendrez bien un café tous les deux.
- Je veux bien, ouais.
- Avec plaisir.
Léo lui récapitula toute l’histoire.
- Je connais ces types de réputation. Des polonais, si je dis pas de conneries. Des guignols. Mais même des guignols peuvent être dangereux. Putain, ils t’ont bien amoché.
- J’ai pas vraiment cherché à parer, on va dire.
- Bourre dans le tas et encaisse, hein, fit Basile avec un sourire. Je te reconnais bien là-dedans. La petite Julia va bien ?
- Elle est avec les garçons de Marlène.
-T’as besoin de combien en tout ?
- Douze milles.
- Dix milles pour la dette et deux milles pour la tranquillité. Ils ont dégustés aussi, j’imagine.
- Voilà.
- Classique. Suis-moi. Mais tu sais que tu peux récupérer tout d’un coup, hein ?
- Comme je te l’ai dit les dix premières fois, je n’ai pas un besoin vital de cet argent.
- Me voilà banquier, maintenant, excellente blague. Marlène, vous pourriez attendre dehors, s’il vous plaît ?
- Pas de soucis.
- Je fais vite, assura Léo.
Léo suivit le vieil homme dans sa chambre. Celui-ci ouvrit son coffre-fort, compta l’argent dans les liasses qui appartenaient à Léo et mit la somme demandée dans une enveloppe et la lui tendit.
- Elle est bien mignonne, ta gamine. Enfin… vous êtes ensembles, au moins ?
- C’est encore un peu tôt pour le dire. On se connaît vraiment depuis deux-trois jours.
- Des fois, c’est suffisant, comme pour moi et ta mère. En tout cas, ça se voit que tu l’aimes.
Il glissa aussi quelques chose d’assez lourd dans la poche de son sweat. Et l’invita à sortir.
- En derniers recours. Mais on peut venir en renforts, si t’as besoin.
- Ça devrait aller.
- Ramène-le moi après. Et dans tous les cas, tu me tiens au jus. Les filles, arrêtez donc d’embêter la dame !
Même si Marlène semblait beaucoup apprécier la discussion avec les petites filles rassemblées autour d’elle.
- Ça y est ?
- Oui.
- Dis-moi quand je dois les appeler. Oui promis, je reviendrais.
---------
La remise de l’argent devait se passer dans les cuisines d’un restaurant turc en centre-ville, le soir même. Par sécurité, seul Léo se rendit sur les lieux du deal. Marlène attendait dans un café une rue plus loin. Léo trouva une place où se garer et observa un moment le revolver que Basile lui avait donné. Il était tenté de l’emmener avec lui au besoin. Mais il se ravisa et le mit discrètement dans la boîte à gants et n’emporta que l’argent et son téléphone portable.
Un serveur le guida dans les cuisines du restaurant, puis dans une arrière-salle. Ils étaient un peu plus nombreux, cette fois. L’un d’eux le fouilla, et garda son portable. Il prit place à la table.
L’homme en face de lui avait le visage taillé à la serpe. Au sens propre, semblait-il
- Un verre ? dit-il en désignant une bouteille.
- Je bois pas en principe, mais allez.
- Santé.
- Santé, dit également Léo en vidant son verre.
- T’as la somme que nous doit la pétasse ?
- Plus les deux milles pour les pépins de santé.
- Euh ouais, on y a réfléchit et t’as pratiquement fêlé le crâne de Pavel. Ça fera mille euros de plus.
- Je m’y attendais un peu.
- Ça pose un problème ?
- Non, il faut juste que j’appelle une connaissance pour ça.
Le chef ordonna quelque chose en polonais, et on rendit son portable à Léo. Celui-ci appela Basile.
- Ouais, ils veulent un peu plus que prévu.
Il laissa Basile parler puis s’adressa à l’homme devant lui.
- Je vous le passe.
- Si tu veux.
Il prit le téléphone, le mit à son oreille. Et Léo regarda avec un sourire légèrement goguenard, son visage se décomposer peu à peu. La conversation téléphonique s’arrêta après quelques minutes et le portable de Léo lui fut rendu. Ce dernier avait l’impression que c’était surtout Basil qui avait parlé.
- T’es le fils adoptif du Chacal? Et c’était vraiment lui au téléphone ?
- Oui, à moins que tu veuilles attendre qu’il te rende visite pour en être sûr.
- On se contentera de ce qu’on a là.
- Merveilleux. Dans ce cas j’y vais.
Léo se leva et s’apprêta à partir. Mais avant ...
- Tiens, vu que je suis encore là, ajouta-t-il froidement. Vous ne vous approchez plus de Marlène ou de ses gamins, peu importe la raison. Ça ira un peu plus loin des crânes fêlés, dans le cas contraire.
Il retourna à la voiture. Il souffla un bon coup, et reprit l’arme dans la boîte à gants avant de la cacher sur lui. Il démarra la voiture de Marlène, et récupéra celle-ci au café. Arrivés à un feu, Marlène demanda comment la rencontre s’était déroulée.
- À merveille, problème réglé. Ils ne te causeront plus d’ennuis.
- T’es génial.
- Je suis pas totalement satisfait. Je m’étais promis de m’éloigner de tout ça.
- Tu le peux maintenant, dit-elle en lui caressant la main.
Léo lui montra discrètement le revolver. Marlène ne parut pas surprise.
- Basile ?
- Oui. Je ne l’ai pas pris avec moi au restaurant, mais j’étais tenté de le faire.
- Le principal c’est que personne n’est mort et que surtout tu t’es servi de ta tête avant d’utiliser tes poings. Allez, on va ramener cette horrible chose à ton père.
- Merveilleuse idée.
Le feu passa au vert et la citadine de Marlène redémarra.
4 décembre : Le postier by Berserkr
Author's Notes:
Cette nouvelle-ci est sous le thème Cassette video.
Sans détester le texte, j'ai l'impression d'avoir fait foiré mon idée de départ :/ Enfin l'idée me faisait marrer sur le coup et j'ai quand même réussi à l'exploiter un peu. Mais il me manque un truc pour être satisfait.
Mais je vous souhaite un bon moment quand même. :)
Martin était postier depuis près de vingt ans. Et en vingt ans, jamais sa tournée n’avait changé. Mais aujourd’hui c’était probablement la dernière.
Il s’en était passé des choses en deux décennies. Des décès de figures du village, comme le vieux Chapman. Donald Chapman était un vétéran de la RAF au glorieux passé de pilote. Certes il radotait un peu sur les Allemands qu’il avait descendus durant ses missions, au cours de ses dernières années. Mais le personnage était vraiment unique en son genre. À l’aube de ses 90 ans, il attendait encore Martin, chaque matin. Et ce par tous les temps. Martin n’avait pas compté les personnes présentes à son enterrement, mais il était encore persuadé que la quasi totalité du village s’était déplacé ce jour là.
Il y avait des nouveaux arrivants, bien sûr. Rien de surprenant, même pour un aussi petit village. Mais ce qui étonnait toujours Martin , c’était à quel point le temps pouvait filer vite. Des mômes, qu’il croisait depuis tout petits, étaient maintenant adultes et avaient leurs propres maisons. Certains étaient même devenus parents.
Son ultime tournée, songea-t-il, la main sur le volant de sa camionnette.
Pour son dernier jour il réservait des cadeaux spéciaux à certains habitants en plus des colis habituels. Histoire de finir en beauté.
Mrs Heaton était une vieille femme tout ce qu’il avait de plus méprisable. Cela remontait à loin maintenant, mais Martin était amoureux de sa fille lorsqu’il était adolescent. Et la mégère désapprouvant leur relation, elle avait envoyé Mavis dans un internat à l’autre bout du pays. Il l’avait aimé Mavis, avec douleur même. Surtout quand elle était partie. Mais maintenant elle habitait en Australie ou peut-être en Nouvelle-Zélande, Martin n’en était pas sûr.
Martin avait refait sa vie entre temps et même s’il n’était plus marié avec Jenny, il s’entendait encore àm erveille avec son ex-femme.
Mais il n’avait jamais oublié ce que la vipère lui avait fait subir. Et le chemin qu’il aurait pu emprunter avec Mavis à ses côtés
Il plaça le colis dans la boîte aux lettres, en plus du courrier habituel. Mais il devait patienter un peu. Heaton n’allait pas chercher son courrier d’elle-même évidemment. Son majordome s’en occupait pour elle. Martin en profita pour livrer celui les voisins de Mrs Heaton et quand le majordome récupéra les colis, il remonta dans sa voiture.
Le manoir Heaton était déjà loin derrière lui quand il actionna le déclencheur. L’explosion retentit. Un bruit terrible et une légère secousse. Vu la fumée que se dégageait de l’endroit, son action avait porté ses fruits. Il n’avait pas beaucoup de temps pour poursuivre son œuvre.
Le suivant fut un ancien camarade de classe, du nom de John Welby. Celui qui avait pourri ses années de lycée, et n’avait jamais eu l’intention de s’arrêter là. Les piques ne s’était jamais arrêtées à la remises des diplômes, comme l’avait tant espéré Martin. Et il était temps que Welby paye.
Oh il ne s’agissait pas d’une bombe, cette fois, même si l’effet allait probablement être tout aussi explosif. Welby allait seulement regarder sa bonne femme se faire sauter par le voisin, sur cassettes vidéo. Et grand chasseur, fans d’armes à feu qu’il était, il allait probablement faire sauter quelques cervelles sous l’effet de la colère. Ou peut-être juste la sienne, ce qui était tout aussi bien. Martin avait commencé à filmer Mrs Welby avec son amant à plusieurs reprises, dès qu’il avait pris la décision de se venger de tout ceux qui l’avaient humilié, durant toutes ces années. Après tout il n’avait plus grand-chose à perdre.
Ainsi toute la matinée, il sema chaos et destruction dans le petit village, mais toujours dans la plus grande discrétion. Finalement il distribua précautionneusement une enveloppe pleine d’anthrax dans la boîte aux lettres de la mairie, mairie qui l’emmerdait depuis des années pour des histoires sans grand intérêt. Il choisit ensuite de retourner chez lui. Mais non pas pour rentrer de sa journée, il avait une dernier chose à adresser à son ex-femme. Elle seule méritait de savoir pourquoi il avait fait ça. Pourquoi il avait agit ainsi alors qu’il ne lui restait plus que six mois à vivre
Quand Jenny ouvrit sa boîte aux lettres, elle ne trouva que des factures et plus étonnant une lettre. Elle était certaine que c’était Martin qui avait posté tout ça. Pourtant ce n’était pas son secteur habituel. Mais la camionnette de la poste était déjà loin. Et surtout elle se demandait pourquoi elle entendait toutes ces sirènes.
5 décembre : Couronne d'étoiles by Berserkr
Author's Notes:
Ce texte a pour thème l'image Forest Tales : https://www.deviantart.com/pajunen/art/Forest-tales-764386635.
Un petit texte de fantasy pour changer un peu, ça vous dit ? :D
Lys observa calmement les deux enfants humains être expédiés sans ménagement dans la cage, où elle séjournait depuis maintenant deux jours. Une petite fille et un garçon un peu plus âgé. La fillette avait une vilaine entaille sur la joue. La dryade se demandait vraiment ce qui poussait les hommes à être aussi cruels entre eux, même avec les plus jeunes. Certes les types qui l’avaient capturé était clairement des esclavagistes sans foi ni loi, mais même les créatures de sa forêt étaient bien moins cruelles entre elles. Et pourtant c’étaient bel et bien les siens que l’on qualifiait de bêtes sauvages. Bon son ami Torgnole était un cas à part, mais les nains était de toutes façons tous d’un naturel bagarreur, d’après ce qu’avait compris Lys. Puis elle n’arrivait pas toujours à comprendre la mentalité des créatures des montagnes.
- Et fermez-là, sinon la dryade pourrait bien avoir envie de vous dévorer, fit la femme qui avait emmené les enfants, avec un horrible sourire édenté. Je vous apporterais à manger plus tard. Si j’y pense.
Les deux petits regardèrent Lys d’un air effrayé. Celle-ci observa l’humaine, d’un air sceptique. Vraiment, depuis quand les dryades mangeaient les enfants ?
Elle attendit que la geôlière soit partie puis se tourna vers les deux petits. Ils étaient manifestement frère et sœur. Le garçon semblait courageux, il observait déjà les alentours pour trouver un moyen de s’échapper. La fillette elle, n’arrivait pas à ravaler ses larmes mais pleurait silencieusement. D’un autre coté, elle ne pouvait s’empêcher d’être curieuse et observait l’étrange femme à la peau verte et aux longs cheveux rouges qui partageait leur cage. En détournant régulièrement le regard, sans doute par crainte de croiser celui de Lys.
Lys ne put s’empêcher de lui sourire. Malgré la gravité de la situation, elle trouvait cette dernière amusante et surtout instructive. Les humains méritaient vraiment le titre de fléau, qu’elle leur adressait, avant même d’en croiser un seul. Ils ne pouvaient évidemment pas tous être aussi moisis, que les brigands, mais quand même. Bien que ses minuscules voisins semblaient même être l’exact contraire.
Elle n’aurait aucun mal à s’échapper. Ceci dit dans l’immédiat, elle devait encore attendre un peu. Être certaine qu’elles étaient bien là était impératif.
On leur apporta à manger un peu plus tard, un ridicule morceau de viande salé et un bout de pain par prisonnier. Et un peu d’eau aussi. Les enfants commencèrent à manger. Lys leur tendit son écuelle.
- Tenez, partagez-vous ça.
- Vous êtes sûre ? demanda le frère.
- Ce n’est guère mon alimentation, expliqua-t-elle, avant de prendre d’un air espiègle. Alors manger des gnomes dans votre genre, hors de question.
Elle vit un premier sourire éclaircir le visage de la fille. Le garçon, lui, semblait toujours très méfiant.
- Comment tu t’appelles ? Moi, c’est Mira. J’ai huit ans.
- Mon vrai nom de dryade est bien trop long et incompréhensible alors tu peux m’appeler Lys. Et j’ai environ trois cents ans.
- Waah !
- Et toi, mon petit, comment t’appelles-tu ?
- Dalan.
- Vous êtes vraiment une dryade ? demanda Mira timidement.
- Tu vois bien que c’est pas de la peinture, grommela son frère, avant de soupirer.
- Oui bah excuse-moi de poser la question, mais les dryades sont bien plus effrayantes dans les histoires de maman, répondit la fillette en fronçant les sourcils dans sa direction.
- On ne mange pas les enfants et on les enlève encore moins, si ça peut vous rassurer, résuma Lys. Je dois toujours me justifier comme ça. C’est agaçant à la fin.
- Je suis rassurée, alors.
- Bonne petite, fit Lys en adressant un clin d’oeil à Mira. Les miennes ont juste le droit de vous jouer des sales tours. Et de vous guider gentiment à l’orée de la forêt. Et le lendemain, les vilains garnements que vous êtes oublient tout. Parce qu’on tient quand même à notre tranquillité, vous comprenez ?
- Oui.
Les enfants finirent de manger en silence. Lys observait Mira avec attention. La coupure sur sa joue n’était pas très profonde, mais elle risquait de s’infecter vu leurs conditions de vie, à tous les trois. C’était trop tôt pour s’attacher à eux, et de toutes façons pas question de se lier avec ces petits singes . Mais la dryade préférait éviter un futur drame.
- Approche-toi, tu veux bien ? On va soigner cette méchante entaille.
- Mais on a rien sous la main pour me soigner.
- Ne sous-estime jamais le pouvoir des plantes, ma chère Mira, devisa Lys. Et comme je tiens plus de cette catégorie que de l’être de chair et d’os, cela tombe très bien.
- D’accord.
La petite fille la rejoignit discrètement, de peur de se faire voir par les gardes. Lys la laissa s’asseoir sur ses genoux et rabattit ses cheveux blonds en arrière. La coupure saignait toujours.
- Dalan, passe-moi l’eau, s’il te plaît.
Le garçon encore méfiant obéit malgré tout et lui tendit le pichet. Lys observa le liquide un moment et le toucha du doigt. Au moins l’eau était pure.
Alors la dryade mordit son pouce jusqu’à ce que celui-ci saigne et fit tomber le sang violet dans l’eau. Elle mélangea le tout du doigt jusqu’à ce que cela forme une sorte de mousse. Très vite, le baume fut prêt à être appliqué.
- Comment te sens-tu ? demanda-t-elle à la petite après le soin.
- Je n’ai pas mal, mais c’est désagréable parce que ça brûle un peu
- Alors mon petit tour de magie fonctionne. Ne t’en fais pas, la sensation de brûlure ne durera pas très longtemps. Il faudra sans doute en remettre d’ici une heure.
- On devrait pas profiter de la tombée de la nuit pour s’échapper ? demanda l’aîné.
- Si toi ô grand guerrier, tu parviens à passer entre les barreaux de cette cage, je veux bien que tu me donnes le secret de ton tour de passe-passe, le nargua Lys, en soutenant son visage avec une main.
- Ça va, j’ai compris.
Le garçon se mit à bouder et cela dura quelques heures. L’après-midi avançant peu à peu, sa cadette s’accorda une longue sieste, la tête tranquillement posée sur les genoux de Lys. Profitant du fait que Mira dormait, la dryade rompit le silence et entama une discussion sérieuse avec son frère.
- Arrête de bouder, mon garçon, nous allons sortir d’ici, je peux te l’assurer. Comment vous vous êtes retrouvés là ?
Le garçon parut hésiter puis accepta de raconter leur histoire.
- Notre village a subi une attaque, il y a six mois. Nos parents parvenaient à peine à nous nourrir, après le pillage. Alors ils nous ont forcés à quitter la maison. Et ce matin, ces salauds nous ont attrapé. Et vous ?
-Je cherchais des amies à moi qui avaient disparues, et ils me sont tombés dessus. Penses-tu, rare, belle et raffinée comme je suis, je serais sans doute vendue comme trophée à un riche seigneur local.
- À quoi bon sortir d’ici en fait, Mira et moi n’avons nul part où aller et aucun avenir
- Je pourrais peut-être vous garder avec moi.
- Vraiment ?
- Au moins quelques temps, oui.
Dalan perdit sa mine sérieuse pour la première fois depuis que Lys l’avait rencontré. Il semblait même presque à un petit garçon normal.
- Les dryades n’ont pas vraiment d’instinct maternel, prévint cependant Lys. Alors ne vous attendez pas à avoir une vraie mère de substitution avec moi. Ceci dit, je veux bien m’occuper de vous un moment. Au moins jusqu’à ce que tu sois suffisamment grand pour protéger ta vie et celle de ta sœur. Si ça ne fonctionne pas, ce qui est tout à fait plausible, je vous confierais à Torgnole et son épouse. Ce sont des nains, il ne devraient pas être trop embêtés avec vous deux et ils vous accepteront sans problèmes, les connaissant. Et avant que tu me demandes, non, les naines n’ont pas de barbe.
- Ce serait bien. Mais je dois y réfléchir.
Elle regarda cependant Mira qui dormait toujours paisiblement contre elle.
- Bon vu que je suis déjà adoptée par cette jolie souris, je pense que la proposition lui plaira, poursuivit-elle amusée en dégageant délicatement les cheveux de la petite, de son front. Mais je peux comprendre ton besoin d’y réfléchir. Mais quoi que vous choisissiez tous les deux, je vous aiderais au moins à sortir d’ici.
Le soleil disparaissait à l’horizon, Lys n’avait plus beaucoup de temps avant de passer à l’acte.
- Mais il faut d’abord que je t’explique ce qu’il va se passer durant les prochaines heures, se rappela-t-elle soudain.
La seule raison pour laquelle la dryade ne s’était pas déjà échappé, était qu’elle n’avait pas encore trouvé les licornes capturée par les humains. Elle étaient au nombre d’une demi-douzaine. En trois jours de captivité, Lys ne les avaient pas encore vues. Cependant, elle avait surprit une conversation entre deux gardes. Les licornes devaient être déplacées ce soir-là. Lys attendait un contact visuel avec elles pour en être certaine.
Elles ne tardèrent pas à passer devant les prisonniers.
Mira était réveillée depuis quelques minutes, la sieste lui avait fait du bien. La blessure avait cicatrisé. Cependant la fillette allait seulement garder une très légère marque.
- Ce sont des licornes ? demanda-t-elle avec une légère excitation.
- Oui.
- Elles avaient l’air plus jolies dans les histoires que mère nous racontait, on dirait juste des chevaux normaux avec une corne, trouva Dalan.
- Tu sais pas apprécié ce qui est beau de toutes façons, affirma sa sœur.
- Les histoires des humains ne tiennent définitivement pas beaucoup compte de la réalité, j’ai l’impression, se moqua Lys. Elles n’en restent pas moins des habitantes de ma forêt au même titre que Torgnole le nain, ou un troll. De ce fait, j’ai l’obligation de les libérer.
Lys devait appeler du renfort. Le vent fit justement tomber des feuilles d’un arbre et celles-ci s’envolèrent droit vers la cage. Elle en attrapa entre ses doigts, la plia en deux puis souffla dedans. Mais ce fut une étrange et envoûtante mélodie qui en sortit et pas un simple sifflement.
- Maintenant patience les enfants.
Ils n’eurent toutefois pas à attendre très longtemps.
- Ah et fermez les yeux, conseilla Lys.
Un bruit se fit d’abord entendre dans la forêt. Puis une horde de créatures diverses se déversèrent sur le camp. Les trolls brandissaient leurs masses, les centaures piétinaient les tentes et les hommes. Torgnole le nain, dans une cotte de mailles trop grande pour lui et d’un épais casque laissant dépasser sa longue barbe brune tressée, fondait sur ses ennemis, avec sa hache. Il visait systématiquement le bas-ventre comme à son habitude.
Les doigts de Lys s’allongèrent alors et se recouvrirent d’écorces. Les branches, tout en continuant de grandir s’enroulèrent autour des barreaux de la porte de la cage. Lys serra sa prise et y mit toute sa force, et la porte finit par céder.
- Venez.
Elle les prit par la main et les fit courir. Deux centaures les attendaient. Lys aida Mira à monter et en fit de même. Dalan monta sur le second centaure.
- Les licornes ? questionna Lys.
- Déjà dans la forêt, madame, répondit le centaure. Et aucune victime à déplorer dans nos rangs. Juste un bouc avec une corne brisée.
- Alors en avant.
Les assaillants se ruèrent dans les bois, laissant le camp en ruines. Très vite, le groupe ralentit sa course. Torgnole rejoignit Lys au milieu du convoi, monté sur un âne. Il était aspergé de sang, et sa hache trônait fièrement dans son dos.
- Ils nous suivent ?
- Oh non, je crois qu’on leur a foutu la frousse pour de bon. Et j’ai coupé suffisamment de bourses pour être heureux un moment. C’est qui, les deux bambins ?
- Je te présente Mira et Dalan.
- Enchanté, mes petits. Je suis le terrible Torgnole. Vous allez voir, la forêt peut paraître rude les premiers jours, mais au final c’est la belle vie.
- Leur décision n’est pas encore prise, Torgnole.
- Ah.
- En fait, si, je me suis décidé, répondit Dalan. Mira, tu veux rester vivre avec Lys ?
- Oui !
- Alors on reste.
- Bwahahahaha, tant mieux alors. Regardez-là, elle en a presque la larme à l’oeil.
- N’importe quoi, s’offusqua Lys
Elle semblait malgré tout assez émue.
- Hésitez pas à venir nous voir, si vous avez vraiment la dalle, par contre. Le ragoût de lapin de Madame Torgnole va vous requinquer comme il faut.
- Meurtriers, tonna Lys.
Le nain partit à l’avant en rigolant de nouveau, grassement.
- On ne devrait pas tarder à arriver à la Couronne d’Etoiles, dit alors le centaure qui emmenait Lys et Mira.
- Qu’est-ce que c’est ? demanda Mira à la dryade.
- Tu comprendras très vite, assura-t-elle.
Quelques minutes plus tard, le groupe atteignit une grande clairière peuplée seulement de rochers. Les arbres reprenaient leurs droits une centaine de mètres plus loin.
- On y est, Mira, dit Lys.
- Mais il n’y a rien.
- Oh que si. Levez la tête. Vous comprendrez.
Les deux enfants obéirent et restèrent ébahis. Jamais ils n’avait vu autant d’étoiles. Encore moins aussi distinctement. Lys les observa amusée. Il y avait probablement plus d’étoiles dans leurs yeux que dans le ciel à cette instant.
- Cette forêt est un royaume sans rois, sans tyrans, dit-elle alors. Elle est là depuis l’origine de la vie, et y restera encore longtemps, temps qu’on la protégera. Il n’y a pas non plus de château fort ni même de vraie couronne. Mais il y a la couronne d’étoiles. Chacun des habitants de cette forêt y est donc sujet, prince et roi à la fois. Ce n’est certes pas votre vrai milieu de vie, mais cela vaut également pour vous deux.
Mira fit un bisou sur la joue de la dryade et se blottit un peu plus contre elle. Lys ne pouvait s’empêcher de lui sourire affectueusement. Les dryades ne pouvait pas avoir d’enfants. Seul la nature décidait de leur venue au monde, et elles naissaient déjà adultes.
Sauf que maintenant elle avait une famille sur laquelle veiller. Ce qu’elle avait recherché durant des siècles.
6 décembre : Palais Mécanique by Berserkr
Author's Notes:
Hey ! Pour le thème Chateau de Versailles, j'avais envie de partir sur une nouvelle à la fois steampunk et uchronique. Je sais pas si c'est réussi, n'étant pas familer avec la SF, en général.
Mais en tout cas, je me suis bien amusé à l'écrire :D J'espère qu'il en sera de même pour vous à la lecture. :)
- Charles, avez-vous entendu la nouvelle ? Les anglais auraient renversé leur monarque. Avec l’aide des écossais et de la république de Norvège.
Il n’y avait aucune joie, dans la voix de Jeanne. Principalement de l’inquiétude même. Bien sûr elle avait peur que la même chose se produise ici en France. Ce quart de XIXe siècle était marqué par les révolutions. Elle craignait que cela mette fin à la petite vie bien rangée que lui offrait son époux grognon mais aimant derrière ses apparences d’ours mal léché.
Mais il n’y avait aucune chance que cela se produise. Tout allait bien ici.
- Cela ne change absolument rien pour moi dans l’immédiat, fit remarquer sobrement Charles, en train de travailler sous ses drôles de machines. Pour vous non plus à vrai dire, ma chère. Le roi Lothaire est probablement le meilleur monarque que l’on ait eu dans ce pays. Le peuple est heureux pour ce que j’en sais. Et nous en avons eu la preuve ces dernière années avec la Norvège et la Suède, les révoltes arrivent parce que le peuple est malheureux et affamé.
-Pourtant cela pourrait donner des idées à certains. Même dans le plus grand confort qui soit, l’être humain voudra toujours plus, Charles.
- C’est vrai, reconnut-il.
Il ne le montrait certes pas souvent mais c’était principalement pour ça qu’il l’aimait, sa Jeanne. Elle disposait d’un esprit des plus vifs et n’avait jamais eu peur de le démontrer. Ce qui avait pour résultat que le jeune ingénieur n’avait pas peur de parler de ses avancées avec son épouse. Car il était sûr qu’elle comprenait dans les grandes lignes le fonctionnements des Beans.
Les Beans était des chariots en aciers auto-propulsés à l’aide de la vapeur et du charbon. Ils étaient appelés ainsi à cause de la forme de haricot de l’habitacle qui surplombait les quatre roues du véhicule. La vapeur était une énergie dont on avait découvert l’utilité vingt-cinq ans plus tôt. Son utilisation au quotidien avait révolutionné de nombreuses domaines. Les transports bien entendu, mais surtout la guerre. Après tout, chaque nouvelle découverte trouvait d’abord un intérêt dans le domaine militaire et il en était ainsi depuis toujours.
Les Beans étaient des monstres de vitesse fait uniquement pour le sport, si bien que leur utilisation se faisait uniquement sur des circuits créés spécifiquement pour ce véhicule. En conduire un était aussi extrêmement dangereux et nombre de pilotes avaient perdu la vie durant des courses. Leurs pendants civils étaient beaucoup moins rapides et plus maniable, mais affreusement chers si bien que seul l’élite pouvait s’en procurer.
Charles n’avait rien créé, il n’avait pas le génie nécessaire pour cela. Mais il était un ingénieur compétent pour tout ce qui touchait à l’utilisation de la vapeur. En plus d’être sa passion, il avait réussi à en faire son métier. Et il les peaufinait ces bolides, testait sans arrêt de nouvelles configurations possibles pour augmenter leurs performances, et surtout vendait ses services aux pilotes de Beans .
- Je crois que j’ai trouvé comment améliorer la mobilité des Beans.
- Oh vraiment ?
- Le châssis est souple de base mais seules deux roues tournent vraiment lors des virages. Alors que si les quatre tournaient en même temps et dans le même angle… il me reste juste à trouver comment faire en sorte que cela fonctionne.
- Cela paraît logique, en y repensant. Mais vous vous pencherez là-dessus après le déjeuner, décréta sa femme, d’un ton sans appel. Claudine ! Où en est le repas ?
Une petite femme replète d’une soixantaine d’années apparut devant la porte. Charles connaissait sa bonne depuis l’enfance, elle avait travaillé pour ses parents et peut-être même pour ses grands-parents. Mais il n’en n’était pas tout à fait certain
- Le repas est presque prêt, madame. Monsieur, vous avez reçu un courrier important, à l’instant.
- Important à quel point ? demanda Charles en rangeant ses outils.
- Et bien, je ne pense pas me tromper en disant qu’il s’agit du sceau royal.
Charles descendit de la calèche d’un pas lent et peu assuré. Le château de Versailles était juste devant lui, imposant et majestueux. Le roi en personne l’avait convoqué et il aurait été impoli de refuser. La question était de savoir pourquoi. Même si il était évident que cela avait un rapport avec les occupations de Charles. Lothaire était un amateur de courses de Beans et lui-même un excellent pilote professionnel.
On le guida dans le hall. Outre la décoration plus classique aux couleurs chatoyantes, ce simple hall était une vitrine technologique à lui seul. Des automates ressemblant comme deux gouttes d’eau à des êtres humains dansaient sans jamais s‘arrêter. Les œuvres d’art n’étaient dans l’ensemble que formes géométriques mouvantes et mécaniques au comportement aléatoire.
Le mouvement, voilà la clé de tout cela. Il avait toujours été présent dans la vie des hommes bien sûr. Mais maintenant tout n’était que mouvement, et ceux qui avaient vécus bien avant la découverte de la puissance de la vapeur et du charbon avaient l’impression d’avoir stagné une majeure partie de leur vie. Il y avait quelque chose d’effrayant là dedans . Charles avait beau être concerné de très près par ce changement, l’impression d’avancer dans un monde inconnu était toujours plus forte année après année. Mais pour autant rien n’avait vraiment changé. Il y aurait toujours les guerres et la misère. Et l’humain resterait le même.
Du moins à court terme.
Parce que depuis qu’il avait franchi le portail du château de Versailles, Charles se disait que l’Homme allait de plus en plus se rapprocher des Dieux et les tutoyer. Cela n’était qu’une question de siècles.
7 décembre : Le Sphinx by Berserkr
Author's Notes:
Alors, des fois ça fait du bien d'écrire sans réfléchir à ce qu'on veux en faire :D J'en ai eu la preuve avec ce texte. J'aime bien détourner le sens d'un thème acessoirement x)
On est donc parti avec le thème " Le Sphinx"
Enjoy
Le Sphinx, petit pub de Belfast, n’avait d’égyptien que son nom. Ou peut-être était-ce du Sphinx grec dont il s’agissait. Depuis toujours, les rares curieux qui avaient poséla question à la taulière de l’endroit, avaient oublié la réponse de Fiona, le lendemain. Quand ils n’étaient pas trop cuits pour simplement ouvrir la bouche. Cette chère Fiona avait dû trouver l’idée comme ça. Oui c’était plus son genre, tout compte fait, se dit-il. La vioque n’était pas non plus vraiment fan d’Histoire ou de mythologie.
Enfin vioque... Norman devait reconnaître qu’il ne connaissait pas d’autres femmes dans la cinquantaine qui étaient aussi belles qu’elle.
- Norm ! Ça fait longtemps dis-moi, l’accueillit joyeusement Fiona. Comment vas-tu ?
- On a eu énormément de boulot sur les chantiers depuis deux semaines, pour changer. Au point que j’ai fini par arrêter de compter mes heures.
- C’est bon pour la boite j’imagine.
- Oh, pour mon compte en banque aussi. Je suis loin de m’en plaindre. Même si je dois reconnaître que la fatigue est bien présente.
- Bon, pour la peine, je peux bien t’offrir la première pinte.
- Chouette, je suis preneur, alors. Merci.
- De rien
La bière était parfaite, Fiona avait répété ces gestes des milliers voire des millions de fois depuis vingt ans. Norman la dégusta tranquillement. Il enchaîna une deuxième pinte, puis une troisième tout en jouant aux fléchettes, avec certains piliers de bar. À un moment il beugla un prénom totalement aléatoire et Fiona le rappela gentiment à l’ordre. Après la sixième, il fit un long passage aux toilettes pour se soulager. Mais aussi pour terminer sa gravure de pénis sur les murs du cabinet, armé de son canif. Une entreprise de longue haleine qu’il avait entamé le mois dernier. Puis l’homme décida qu’il était temps de freiner un peu sa consommation. Même s’il se sentait plutôt bien.
Norman retourna au bar, mais seulement pour discuter avec la patronne. La plupart des clients avaient déserté, mais il lui restait bien une heure avant la fermeture. Il lui vint alors à l’esprit qu’il ne l’avait jamais demandé à Fiona. Pourtant il la côtoyait tous les jours depuis pratiquement douze ans.
- Je me demandais un truc. Ça fait longtemps que t’es célibataire ?
- Bon te connaissant, c’est pas pour me draguer, gamin, comprit Fiona amusée, les coudes sur la table. Mais pourquoi cette question ? Même si ce ne sont pas vraiment tes oignons, conclut-elle en lui faisant un clin d’oeil.
- Ben, ça fait un sacré paquet d’années qu’on se connaît, maintenant...
- Oui c’est vrai, tu étais encore mineur d’ailleurs à l’époque. J’aurais dû refuser de te servir. Même si tu t’en sors mieux que beaucoup des clients du pub, disons-le franchement. Enfin je te laisse finir.
- Et du coup, je me dis que je t’ai jamais vu dans les bras d’un mec. Ou d’une femme d’ailleurs, on s’en fout. Pourtant, et je le dis sans arrières pensées, mais t’es sacrément jolie fille.
- Je suis mariée à cet établissement en quelque sorte.
- Ouais je m’en doute.
- Et puis j’ai un caractère de cochon, tu le sais bien
-C’est gentil un cochon pourtant.
Fiona se met alors à ricaner légèrement.
- Bien sûr, je lui ai fait quelques infidélités, au Sphinx hein. Mais tu sais quoi ? Je crois que je suis tout simplement pas faite pour être en couple. Ou disons, plus faite pour ça.
- Donc t’as déjà eu quelqu’un.
- Oui.
- C’était sérieux ?
- Oh que oui, répondit-elle avec un air mélancolique. C’était il y a pile trente ans de ça, quand j’habitais encore à Derry. Puis il est mort maintenant. C’était une autre vie.
- Attends… janvier 1972 du coup ?
- Ouais. Tu percutes vachement vite pour un mec ivre.
Le Bloody Sunday, évidemment, se dit Norman.
Il n’intervint pas par la suite. Il laissa Fiona raconter ce qu’il s’était passé, même s’il la connaissait par coeur cette histoire. Mais la femme parvint à le maintenir éveillé. Puis L’Irlande du Nord était un petit pays et Norm connaissait un nombre de personnes de son entourage qui avaient connus la tragédie de près ou de loin. Fiona raconta comment les soldats anglais avaient commencé à tirer dans la foule. Son amour de l’époque n’était pas mort sur le coup. On lui avait tiré dans le dos, alors qu’il cherchait à secourir les blessés. Un soldat l’avait ensuite achevé d’une seconde balle à bout portant. Pour autant elle ne semblait ni triste ni en colère. Norman supposait qu’elle avait suffisamment connu ce genre d’émotions, en trente ans.
- C’est drôle, j’ai tellement l’habitude d’écouter les problèmes et la vie des autres, que raconter la mienne m’a toujours un peu effrayé. Mais avec toi, c’est plus facile.
- Pourquoi donc ?
- Je ne sais pas. T’es beaucoup plus futé que t’en as l’air, je pense, ça aide énormément. Du coup, merci.
Elle regarda sa montre.
- Je vais pas tarder à fermer. À force de parler, je n’ai pas fait attention à l’heure.
- Pas de soucis. Tu veux de l’aide ?
- Non ça ira, mais c’est très gentil de proposer.
- Vaut mieux que je rentre de toutes façons, je travaille demain. Bonne nuit, ma bonne dame.
Il enfila sa veste et se dirigea vers l’entrée, en titubant légèrement. Mais avant il avait une dernière idée derrière la tête.
- Fiona ?
- Hmm ?
- Tu fermes toujours le lundi ?
- Oui, bien sûr.
- Alors je t’invite à dîner lundi soir, si tu n’as rien de prévu. En toute amitié, hein !
Son sourire n’avait jamais paru aussi éclatant. Et celui-là il n’était pas prêt de l’oublier, même avec tout le sang présent dans son alcool.
End Notes:
Et non la dernière phrase n'est pas une bourde :P
8 décembre : Le Petit Faucheur Magazine by Berserkr
Author's Notes:
Alors déjà pardon pour cette chose xD En suite, le thème vous l'aurez compris, c'est qu'il fallait écrire un article de presse.
Après je suis totalement irresponsable de ce qu'il s'est passé dans ma tête promis !
Le Petit Faucheur
NEWS
C’est officiel : Les Cavaliers de l’Apocalypse se reforment pour une tournée mondiale !
Après plusieurs guerres, épidémies et catastrophes dévastatrices à leur actifs, les Cavaliers ont décidé de se reformer au grand complet. C’est ce qu’a annoncé Guerre au détour d’une conférence ayant pour thème la manipulation des dirigeants humains, qui réunissait nombre de divinités païennes et de démons connus.
Ils ont prouvé à maintes reprises qu’ils faisaient très bien leurs tâches en solitaire. Mais vous vous souvenez sans nul doute davantage de leurs plus grands faits d’armes collectifs, comme la peste noire ou la fièvre espagnole dans le cas des épidémies, ou encore l’extermination progressive des natifs américains. Même si bien sûr la seconde Guerre Mondiale reste à ce jour et de loin, leur plus belle entreprise.
Le Diable en personne a salué cette décision, et nul doute qu’il saura profiter comme il se doit de l’afflux d’âmes qui découlera de cette nouvelle formation. Et ce que quelque soit le plan des Cavaliers.
Dossier en page 3
Décès de la Gourmandise, à l’âge de 6 000 ans.
Après un siècle de lutte contre un cancer du colon, le plus imposant des pêchés capitaux est finalement décédé sur ses toilettes la nuit dernière. Car oui pour rappel, les Sept Pêchés Capitaux ne sont pas immortels, bien que trouver des remplaçants à l’une de leurs fonctions n’a rien de bien compliqué .
Connu pour avoir de nombreuses actions chez O’ Ronalds et de nombreuses autres chaînes de fast-food célèbres chez les mortels, La Gourmandise laisse derrière lui une famille de maintenant six frères et soeurs, en larmes. Ou en colère c’est selon.
Car vu comment le personnage s’était vautré dans la cupidité, la paresse et dans (et aussi régulièrement sur elle semble-t-il, mais ce ne sont là que des rumeurs, bien entendu) la luxure, nul doute que nous réentendrons parler de cette histoire. Car son héritage important pourrait susciter l’envie, mais nul doute que les Six Pêchés Capitaux sauront réglé cela avec fierté.
Au grand désarroi de tout le monde, Dieu persiste et signe: « Non, je n’ai jamais autorisé la moindre Croisade… »
La phrase a fait rire bien des gens en Enfer, évidemment. Pourtant de l’avis de tous les démons interrogés, il n’a pas à s’en vouloir.
« C’était évidemment une bonne initiative de sa part, assure ainsi Belzebuth. J’imagine qu’il a seulement la crainte d’avouer que nous avons rafler la majeure partie des âmes dans chacune des dîtes croisades, et ce sous son nez. Mais que voulez-vous, c’est un vieil homme buté. Vous devriez demander à ce bon vieux Lulu. Il vous dira la même chose que nous autres à son sujet. »
Manteaux en peaux humaines : les associations de défenses des mortels haussent le ton
( Ça vaut pas la peine d’en faire un article parce que honnêtement, on s’en bat les steaks ( d’humains évidemment.) )
9 décembre : Fieber by Berserkr
Author's Notes:
Il s'agit d'un texte sur le thème de la chute du Mur de Berlin. J'ai eu bien du mal à pondre quelque chose dessus mais bon moi et l'histoire du XXème siècle, ça fait trois :D
Bonne lecture !
- Bon je pense que vous avez tous en tête les événements de ses dernières heures. C’est l’occasion de faire la fête. Mais ça tombe bien, on est là pour ça de toutes façons.
Ben soupira. C’était bien le genre de Tommy de partir dans ce genre d’envolée juste avant le début du concert. Mais ça n’avait à ses yeux pas sa place dans un concert de metal. Non pas que lui-même s’en foutait. Il était presque sûr d’avoir de la famille à l’est. Mais il savait pas encore lire quand ces idiots avaient construit le mur de la honte. Ses parents n’en avaient jamais trop parlé. Sans que le sujet soit tabou, ils avaient essayé d’oublier cette séparation douloureuse avec leurs proches, supposait Ben. Mais avec les années qui s’écoulait, il avait tout simplement oublié. Sans oublier qu’il était en froid avec sa famille depuis ses dix-huit ans et la dernière fois qu’il avait parlé à ses petites sœurs c’était à l’enterrement de leur père, que le cancer avait lentement emporté, deux ans plus tôt.
Le show débuta. Ben connaissait ses lignes de guitares par coeur, les jouait presque mécaniquement et hurlait dans le micro quand c’était à son tour de le faire. Leur show était bien rodé maintenant. D’autres aurait trouvé répétitif de toujours jouer la même chose dans les mêmes salles paumées. Mais ça lui plaisait. Puis ce groupe était un passe-temps plus qu’une vraie vocation.
Le concert terminé, le groupe se joignit au public agglutiné au bar. Un seul et même sujet de discussion. Les gens affluaient de Berlin-est depuis le début de la matinée. La frontière de béton n’avait plus lieu d’être et toute la ville, tout le pays était en fête.
Fatigué et légèrement ivre, Ben prévint ses amis qu’il allait rentrer chez lui.
Il ne savait pas vraiment ce qu’il en était dans le reste de la ville, mais partout où il passait tout n’était que fête, bonne humeur et alcool. Les flics étaient de sortie mais même malgré ça l’ambiance restait légère. Ben, sans particulièrement partager leur joie, comprenait le besoin des berlinois de l’exprimer. Pour lui c’était une journée comme une autre, même si ce jour marquerait sans aucun doute l’Histoire. Et probablement la fin de l’URSS dans quelques temps, si tout se déroulait de façon logique du moins.
Après une vingtaine de minutes de marche, il tomba sur un collègue de travail et resta boire un verre avec lui. À un moment, une fille totalement ivre lui tomba dessus et insista pour l’embrasser sur la bouche. Agacé, Ben finit par accepter pour qu’elle lui foute la paix, mais il se fit la réflexion qu’elle paraissait quand même vraiment jeune.
Arrivé chez lui, il mit directement un vinyle en route, et se fit un truc à manger. Le son était suffisamment fort pour couvrir les bruits de l’extérieur agaçant à la longue et il ne risquait pas de déranger le voisinage. Personne n’avait l’air d’avoir envie de dormir, cette nuit.
Il était minuit quand le téléphone sonna. Qui pouvait avoir le culot d’appeler à cette heure ?
- Ouais ? Je sais pas si vous avez vu l’heure, mais…
- Ben ? C’est Andrea.
- Soeurette ?
- T’en connais beaucoup d’autres des Andrea ?
- Pourquoi t’appelles ? demanda froidement Ben.
Même si ce n’était pas vraiment le ton qu’il voulait employer.
- Tu peux arrêter de faire ton ours cinq minutes ? C’est toujours aussi désagréable.
- Excuse-moi. La journée a été longue. La nuit aussi en fait.
- Mouais, excuse acceptée, on va dire. En fait c’est maman qui cherchait à te joindre à la base mais elle n’a plus ton numéro. Oncle Karl a passé la frontière ce midi. Il loge chez maman. Et elle souhaiterait que tout le monde vienne à la maison, dimanche.
- Le frère de papa ?
- Oui. Tu ne t’en rappelle pas ? Carolina et moi c’est normal, on na savait pas encore marcher, je veux dire. Mais t’avais cinq ans en soixante et un.
- Il s’est passé pas mal de truc depuis, fit remarquer Ben. Puis tu te souviens de tout ce qu’il t’es arrivé à cinq ans ?
- Oui pas faux.
Peut-être était-ce l’occasion de recoller les morceaux pour de bon avec sa famille. Mais si même l’enterrement de son père n’y avait pas aidé, Ben doutait que le reotur de son oncle y parvienne. Sauf que d’introspection en introspection, Ben avait bien compris que le problème venait en grande partie de lui et son incapacité à pardonner. Mais pardonner quoi exactement ? Ses parents n’avaient jamais été d’accord avec ses choix de vie, mais quel parent l’était vraiment, au fond.
- Ecoute, dis à maman, que je ne peux rien promettre pour dimanche, mais j’essayerais de venir.
- Chouette. Et hésite pas à passer à la maison. Les petits me demandent tout le temps quand tonton Ben va venir. Les gobelins ne sont toujours pas couchés d’ailleurs, et hors de question qu’ils profitent de la situation trop longtemps. N’empêche, c’est super tout ce qui se passe. Le retour d’oncle Karl et la fin de cette abomination de mur.
- Oui.
- Bon, on se voit, dimanche, frérot !
- J’ai dit à l’instant qu’il n’y avait rien de sûr.
- Je sais mais moi, je ne te laisse pas le choix ! lança-t-elle gentiment. Alors à dimanche !
Ben avait presque envie de rire. Il reconnaissait bien là l’innocence et le caractère de sa petite sœur. Caractère qu’elle n’avait jamais vraiment perdue en grandissant.
10 décembre - Sonnet pour vagabonds by Berserkr
Author's Notes:
Et me voilà avec mon sonnet tout pété, parce que j'ai jamais été doué en poésie, d"abord ! :P Mais on va dire que s'en est un hein :D
Bon plus sérieusement, voici l'introduction à The Man Comes Around, l'histoire qui rythmera le reste de mon calendrier et qui sera en gros un western. :D
Bonne lecture !
Ami, vois-tu seulement ceux qui passent devant ta porte ?
Appelés mécréants, criminels, pisseux, bâtards et sans dents
Cadavres du nouveau continent, naissant sur une terre morte
Ceux qui pour un rien, au bout de la corde, gisent pendants
Ils sont prêts à être accueillis, d’une unique balle destructrice
Sont-elles damnées ces âmes errantes, sans sou ni espoir ?
Fuyant cette bonne femme aveugle et injuste, appelée Justice.
Leur jetteriez-vous volontiers une pièce pour leurs déboires ?
L’homme en gris boite et les loups le suivent
Seul, il erre à jamais dans ce grand paradis vert,
à chaque pas, incertain, toujours sur le qui-vive.
Là où beaucoup errent et trop peu survivent
L’Ouest Sauvage, cette grande tombe à ciel ouvert
L’homme en gris boite et les loups le suivent
11 Décembre - 1/ Des Chrysanthèmes pour John Silver by Berserkr
Author's Notes:
On y est ! :D J'espère que vous êtes prêt parce cette histoire rythmera le reste du Calendrier de cette année.
Sortez le moonshine et les colts mouahahaha :D
Ptite précision, certains chapitres auront le droit à leur musique attitrée pour encore plus d'ambiance ;)
The Man Comes Around
L’homme en gris boitait, et les loups le suivaient de très près.
C’était une belle journée ensoleillée, mais l'inconnu ne voyait plus l’environnement montagneux qui s’étendait devant lui qu’en d’inquiétantes nuances de gris. Il s’appelait Jonah Silver. Sa barbe était drue et ses cheveux emmêlés et sale. Et il s’accrochait à son couteau, devenu une extension de son bras. Sa seule arme.
L’une de ces satanées bestioles avait commencé par l’attaquer à la jambe, très violemment deux heures plus tôt. Après l’avoir éventrer, Jonah était parti précipitamment de son campement. Dans la panique avait oublié toutes ses biens. Y compris sa vieille carabine. Qui de toutes façons était vide.
Alors qu’il s’assurait qu’il avait mis suffisamment de distance entre lui et les loups, il se prit les pieds dans un rocher et dévala la pente sur plusieurs mètres. La descente fut rude et il se cogna à plusieurs reprises contre d’autres rochers, sans heureusement se fendre le crâne. Ce qui en soi, était préférable. Car ses poursuivants allaient sauter sur l’occasion. Littéralement, en fait. Il supposait qu’il s’était aussi cassé le bras et peut-être une côte ou deux.
Il venait d’atterrir dans un champ de fleur. Un immense champ de fleurs blanches qui semblait indiqué avec une cruauté sans commune mesure, son destin funeste.
Difficile de ne pas les entendre approcher et grogner, même à moitié conscient. Il entendait aussi d’autres bruits moins reconnaissables.
Cependant les coups de feu qui suivirent, eux, l’étaient parfaitement. Jonah sentit qu’on s’approchait de lui.
- Il est en vie ? demanda un homme
- On dirait, fit une seconde personne. On va faire en sorte qu’il le reste.
Une femme visiblement.
- Bon aide-moi à le mettre sur le chariot, ordonna-t-elle.
- Pour en faire quoi ? On n’a ni la place à la maison ni le matériel pour le soigner.
- Et Mrs Finley ?
- Ah j’y avais pas pensé.
- Allons chez Ann, alors. Ça nous fera moins de route, en plus.
Jonah se sentit alors soulever par les deux personnes et ne put s’empêcher de grogner de douleur. L’une d’elle resta veiller sur lui. La jeune femme comprit-il en percevant sa respiration douce et légère. Elle lui prit aussi la main.
- Tenez le coup, ce ne sera pas très long, dit-elle d’un ton rassurant.
Il essaya de parler mais ne reconnut pas sa propre voix.
- Economisez vos forces, vous en aurez besoin.
De la suite, Jonah n’en eut que des bribes de souvenirs, quand il se réveilla un matin. Il se souvenait seulement qu’une femme avait recousu ses blessures, qu’on changeait ses bandages chaque jour et qu’on lui apportait à boire et à manger régulièrement. Le reste du temps, il le passait à dormir ou à végéter dans une épaisse brume. Son bras et sa jambe le faisaient souffrir. Mais il s’en sortait avec de simples mais importants hématomes au lieu des côtes cassées qu’il avait imaginé. Quelqu’un avait laissé des fleurs sur la commode proche de son lit. Jonah n’avait jamais eu l’âme d’un botaniste, et n’était pas fichu de les reconnaître. Mais il devait avouer que cela apportait un peu de fraîcheur à la pièce.
Une petite fille rousse et haute comme trois pommes, jouait sur le sol avec sa poupée. Elle semblait complètement dans son monde.
- Excuse-moi, petite... commença-t-il.
La réaction de la fillette fut pour le moins violente puisqu’elle poussa un long cri aigu et prit la poudre d’escampette, aussitôt. Jonah comprit que sa voix d’outre-tombe en était la cause. Il entendit alors quelqu’un parler dans la pièce d’à coté, quelques minutes plus tard.
- Pour commencer, Constance Finley, je peux savoir ce que tu faisais dans la chambre du malade ?
- Mais c’est Lee, il voulait pas que je vienne avec lui. Du coup je voulais trouver un endroit tranquille pour jouer.
- Tu n’es pas obligée de coller ton frère tout le temps comme ça, enfin. Et ça change rien au fait que tu n’avais rien à faire dans cette chambre. Bon tu iras voir Selma, elle trouvera bien quelque chose qui t’occupera.
- Mais maman, j’ai pas envie de travailler.
- Connie, fit sa mère d’un ton sans appel.
- Bon d’accord.
- Mais d’abord, tu viens avec moi et tu t’excuses auprès du malade. J’imagine qu’il a déjà connu mieux comme réveil.
La porte s’ouvrit sur une grande femme, aussi rousse que sa fille, et la petite Connie, son portrait craché, cachée derrière les jupons de sa mère, jetant un regard noir à Jonah. Mrs Finley avait le visage miné par la fatigue,mais Jonah pouvait lire dans son regard sa force et son mental hors du commun. Il devait aussi reconnaître qu’elle était très belle. La petite peste, elle, avait l’air d’un chaton qui cherchait sans cesse une nouvelle bêtise à faire. Mais elle plissait toujours les yeux à chaque fois qu’elle croisait le regard de Jonah.
- Bonjour, comment vous vous portez ? fit la femme.
- Bien j’imagine, compte tenu de la situation.
- Ann Finley. Et la petite souris cachée derrière moi, c’est Connie.
- Jonah Silver.
La fillette présenta ses excuses avant de sortir en courant. Elle en avait cependant profité pour tirer la langue à Jonah dans le dos de sa mère. Le malade ne dit rien. Le caractère de la gamine avait même un coté plus qu’amusant. Laissés en tête à tête, Ann s’approcha tranquillement et s’assit sur le lit. Elle ausculta Jonah pendant un moment.
- En quelle année sommes-nous ?
- 1893. En juillet, j’imagine, à moins que j’ai dormi deux semaines d’affilée.
- On dirait que vous n’avez, par je ne sais quel miracle, pas pris de coup sur la caboche.
Elle rapprocha ses mains entre elles avec un sourire. Jonah ne la connaissait guère suffisamment pour l’assurer, mais cette femme semblait l’incarnation de la bonté.
- Ça va définitivement mieux, qu’il y a quelques temps. Vous avez eu une fièvre importante pendant deux ou trois jours. Je dois reconnaître que j’ai cru vous perdre.
- Vous êtes médecin ?
- Oh non, je ne suis guère plus qu’une simple fermière, répondit-elle. Mais la plupart des médecins du coin sont des charlatans, qui vous ferait passer n’importe quel liquide louche pour un remède miracle. Et le reste est trop cher. Par chance, mon défunt père, paix à son âme, l’était et il m’a laissé le seconder pendant des années. Le bon point c’est que vous vous rétablissez rapidement et que vos blessures sont au final assez bénignes. Puis j’ai pu réduire votre fracture assez facilement, sans vouloir me vanter, conclut-elle avec un petit rire.
- Je vois, merci alors.
- Vous pouvez rester le temps de vous rétablir complètement bien entendu.
- Si besoin je vous aiderais à la ferme, pour vous dédommager.
- Ce serait avec grand plaisir. Mais attendez d’avoir récupérer avant.
- L’homme et la femme qui m’ont ramené ici travaillent pour vous ?
- Les jumeaux Bluebird ? Oh non, mais ce sont de très bons amis. Presque des membres de la famille à vrai dire.
- J’aimerais les remercier.
- Ils tiennent un comptoir de chasse dans les montagnes, mais ils passent régulièrement à la ferme, ne vous en faîtes pas. Je vous laisse, reposez-vous Jonah, vous en avez besoin.
Ann se leva et se dirigea vers la porte.
- Pas un seul instant vous m’avez demandé comment je me suis retrouvé dans cette situation, fit remarquer Jonah.
- Vous m’en parlerez en temps et en heure, assura-t-elle. Mais je crois avoir deviné l’essentiel. Oh j’avais oublié. Ed a retrouvé votre campement ou du moins ce qu’il en restait il y a quelques jours. Il manque des choses je suppose et on dirait qu’une horde de sangliers a tout dévasté, mais vous il reste quand même quelques possessions, y compris votre fusil.
- Est-ce qu’il aurait trouvé un médaillon ? En platine.
- Oui, l’objet m’a même bien tapé dans l’œil, je le reconnais. Il a une valeur sentimentale ?
- C’est tout ce qui me reste d’un proche.
- Alors n’en dites pas plus, je vous l’amène de ce pas, assura-t-elle. On dirait bien que vous avez eu énormément de chance, Jonah Silver.
End Notes:
Et à demain pour la suite !
Attention: Tous les personnages et situations reconnaissables sont la propriété de leur auteurs respectifs. Les auteurs reconnaissent qu'ils ne touchent aucun droit sur leur travail en publiant sur le site.